10 juillet - 15 septembre 1940 - Bataille aérienne d'Angleterre

La Bataille d'Angleterre est le nom donné à la campagne aérienne menée par la Luftwaffe contre la Grande-Bretagne, durant l'été et une partie de l'automne 1940. L'objectif des Allemands est la neutralisation de la Royal Air Force, de manière à permettre la traversée de la Manche et le débarquement de la Wehrmacht sur les côtes sud de l'Angleterre. Cette campagne va se dérouler en plusieurs phases. D'abord, du 10 juillet au 12 août, les attaques contre le traffic maritime britannique dans la Manche. Ensuite, du 13 août au 6 septembre, la neutralisation des terrains d'aviation du RAF Fighter Command. Et enfin, à partir de cette date, le bombardement des villes, en particulier de Londres, et des industries anglaises. Cette dernière phase marque le début du "Blitz", qui se poursuivra jusqu'en mai 1941.



Contexte.

Après l'évacuation de Dunkerque (27 mai - 4 juin) et la capitulation française (22 juin), Adolf Hitler se concentre sur les plans d'invasion de l'Union Soviétique, convaincu que la Grande-Bretagne, qui se retrouve seule après sa défaite sur le continent, demandera très vite à signer la paix.


Bien que le Secrétaire britannique aux Affaires étrangères, Edward F.L. "Lord Halifax" Wood, et certains membres du parlement britannique sont favorables à une paix négociée, le nouveau Premier ministre, Winston Churchill, et une majorité au sein de son Cabinet ministeriel refuse toute armistice signée avec Hitler. Aussi Churchill, avec sa rhétorique habituelle, fait tout ce qui est en son pouvoir pour dissuader l'opinion publique d'une possible capitulation. Au contraire, il veut préparer les Britanniques à "une longue guerre". D'ailleurs, le 18 juin précédent, au cours d'un discours devenu célébre, Churchill avait déclaré à la Chambre des Communes: "La bataille de France est terminée. La bataille d'Angleterre est sur le point de commencer... C'est l'heure de vérité... Je vous promet du sang, des larmes et de la sueur... Nous nous battrons sur les plages, dans les champs et dans nos villes, mais nous ne nous rendrons jamais!"

Photo ci-dessous: Winston Churchill avait une foi inébranlable dans la victoire finale, même aux heures les plus sombres de la Seconde Guerre mondiale.


Le 11 juillet 1940, le Grand Amiral Erich Raeder, commandant en chef de la Marine de Guerre allemande (Kriegsmarine), déclare à Hitler qu'une invasion de la Grande-Bretagne par mer, en traversant la Manche, n'est possible que si la Luftwaffe s'assure de la supériorité aérienne dans cette zone. Raeder a encore en souvenir la campagne de Norvège, où la Kriegsmarine avait subi de lourdes pertes face aux 8 cuirassés, 21 croiseurs et 50 destroyers allignés par la Home Fleet. La Kriegsmarine, affaiblie, est désormais incapable de se mesurer à la Royal Navy. Dès lors, la seule alternative qui reste est que la Luftwaffe utilise ses bombardiers pour interdire tout traffic maritime ennemi et s'assure de la supériorité aérienne au-dessus de la Manche et de l'Angleterre.

Le 16 juillet 1940, en accord avec la déclaration de Raeder, Hitler ordonne la préparation d'un plan d'invasion terrestre de la Grande-Bretagne, en espérant que la nouvelle de ces préparatifs pousse les Britanniques à négocier une paix. Dans ce sens, il signe sa "Directive n°16" (Führer-Anweisung N°16):

"Puisque l'Angleterre, malgré sa situation désespérée et sans espoir, ne manifeste aucun désir de négocier, je décide de préparer une opération de débarquement contre elle, et si nécessaire, de la mettre à exécution. Le but de cette opération est d'éliminer l'Angleterre comme base permettant de poursuivre la guerre contre l'Allemagne, et si cela s'avère nécessaire, d'occuper entièrement la Grande-Bretagne.

"A cette fin, j'ordonne les choses suivantes:

"1° Les opérations amphibies doivent être menée sur un front s'étendant approximativement de Ramsgate jusqu'à la région de l'île de Wight, avec la Luftwaffe jouant le rôle de l'artillerie, et les unités navales le rôle des ingénieurs.

"2° Les préparatifs du débarquement en Angleterre incluent les opérations aériennes visant à le rendre possible.

"2a. L'aviation britannique devra donc être neutralisée, de manière à ce qu'elle n'entrave pas la traversée de la Manche et les opérations amphibies."


Tous ces préparatifs devront être terminés pour la mi-août 1940. Le plan, ayant reçu le nom de code d'Opération Seelöwe (Lion de Mer), est soumis au Commandement suprême de la Wehrmacht (OKW) et est programmé pour la mi-septembre 1940. Seelöwe désigne les opérations de débarquement sur la côte sud de l'Angleterre, qui seront précédée d'un assaut aéroporté. Ni Hitler ni l'OKW ne croit possible un tel débarquement avant que la Royal Air Force soit neutralisée. Est assigné à ces opérations le Heeresgruppe A du maréchal Gerd von Rundstedt, soit 41 divisions, dont 6 panzers et 3 motorisées.

Pour sa défense terrestre, la Grande-Bretagne ne dispose plus que de l'équivalent de vingt-cinq divisions d'infanterie, absolument démunies d'armement lourd, de moyens de transport et de blindés, réparties sur tout le territoire métropolitain. Son seul espoir repose donc sur l'efficacité de ses forces aériennes. Cet espoir se justifiera les semaines suivantes.


Forces aériennes en présence.

1° Chasseurs.

Les chasseurs allemands Messerschmitt Bf-109E et Bf-110C vont se mesurer aux Hawker Hurricane Mk.I et Supermarine Spitfire Mk.I du RAF Fighter Command. Le Bf-109E (Emil) dispose d'une plus grande vitesse ascensionnelle et est plus rapide en palier que les chasseurs britanniques, mais ces derniers affichent des meilleures capacités de manoeuvrabilité, notamment d'un plus faible rayon de virage en cas de combat tournoyant.

En septembre 1940, le Hurricane Mk.IIa commencera à entrer en service, mais en tout petit nombre. Cette version atteindra une vitesse maximale de 550km/h en palier, soit 48km/h de plus que le Mk.I. L'apparition du Spitfire Mk.I au-dessus de Dunkerque a causé une vive et désagréable surprise aux pilotes de chasse de la Luftwaffe.

Ci-dessous: cheville ouvrière du RAF Fighter Command en août-septembre 1940. 1° Hawker Hurricane Mk.I. 2° Supermarine Spitfire Mk.I.



Le Spitfire et le Hurricane sont tous deux équipés de 8 mitrailleuses Browning .303 de 7.7mm dans les ailes, contre 2 canons MG-FF de 20mm dans le capot moteur et 2 mitrailleuses de 7.92mm dans les ailes pour le Bf-109E. Ce dernier, dans les versions E-4/B à E-7, peut être employé comme chasseur-bombardier: il est en effet capable d'emporter une bombe de 250kg sous le fuselage. Le Bf-109E est également handicapé par un rayon d'action limité, comparé aux chasseurs britanniques.

Photo ci-dessous: Bf-109E-4, la version la plus répandue de ce chasseurs en août-septembre 1940.


Le Bf-110C est un avion bimoteur biplace à long rayon d'action. Surnommé Zerstörer ("Destructeur"), il est utilisé au début de la Bataille d'Angleterre comme chasseur d'escorte des bombardiers. Bien qu'il soit plus rapide que le Hurricane et atteint presque la vitesse du Spitfire, il manque cruellement de manoeuvrabilité lors des combats aériens, ce qui en fera une proie facile. Souffrant de lourdes pertes dans son rôle d'escorteur, il obtiendra de meilleurs résultats en tant que chasseur-bombardier ou encore bombardier en piqué. Il est équipé d'un ratelier sous chaque aile permettant d'emporter une paire de bombes de 250kg. Au cours du Blitz, il sera également employé comme chasseur nocturne.

Profilé ci-dessous: Bf-110C-1 Zerstörer employé au cours de la Bataille d'Angleterre.



2° Bombardiers.

En août-septembre 1940, la flotte de bombardiers de la Luftwaffe utilise des bombardiers en palier Junkers Ju-88A, Heinkel He-111P/H et Dornier Do-17Z, ce dernier surnommé le "Crayon Volant", ainsi que des bombardiers en piqué Junkers Ju-87B. Le bombardier allemand présent en plus grand nombre est le He-111.

Photo ci-dessous: le trio des bombardiers moyens de la Luftwaffe en août-septembre 1940. 1° Heinkel He-111H. 2° Junkers Ju-88A. 3° Dornier Do-17Z.






Les bombardiers moyens allemands sont limités dans leurs capacités. Le He-111 est le plus lent d'entre-eux, et le Ju-88 le plus rapide, quand celui-ci s'est débarassé de sa charge de bombe externe. Le Do-17Z "Crayon Volant", vu l'étroitesse de son fuselage, transporte une charge de bombe limitée. Confrontés aux chasseurs Spitfire et Hurricane, ces trois types de bombardiers souffriront, à l'instar du Stuka, d'importantes pertes, en particulier le Ju-88. Au cours du Blitz, ils seront utilisés comme bombardiers nocturnes.

Bien qu'il ait été utilisé avec succès lors des campagnes de Pologne et de France, le Ju-87 Stuka subira des pertes considérables lors de la Bataille d'Angleterre, en particulier le 18 août 1940. Sa vitesse maximale de 340km/h est très insuffisante et va en faire une proie très facile pour les intercepteurs britanniques.

Après cette journée noire, il sera bien vite retiré des unités de première ligne jusqu'à l'invasion de l'Union Soviétique, le 22 juin 1941.

Photo ci-dessous: moteur Junkers Jumo 211D installé sur un Ju-87B-2. Une "Trompette de Jéricho" est visible sur la jambe du train d'atterrissage.



3° Pilotes.

Avant la guerre, le processus britannique de sélection des candidats potentiels est devenu accessible à toutes les classes sociales depuis la création, en juillet 1936, de la "RAF Volunteer Reserve" (RAFVR), un Corps de Réserve chargé de la formation et de l'entraînement des aviateurs destinés aux formations de première ligne. Grâce à ce système, les effectifs de la RAF, dans les années précédant la Seconde Guerre mondiale, se multiplient grandement et, le 1er septembre 1939, elle compte dans ses rangs 6,646 pilotes formés grâce à la RAFVR.

En août 1940, la Royal Air Force compte environ 9,000 pilotes pour approximativement 5,000 avions disponibles. Le RAF Fighter Command n'est pas encore à cours d'aviateurs, mais il commence à éprouver des difficultés à recruter des pilotes suffisament entraînés, pour combler les pertes en opération. Alors que la production de chasseurs est de 300 exemplaires chaque semaine, celle des pilotes confirmés au cours de la même période s'élève péniblement à 200.

Sur les 9,000 pilotes britanniques, seul un tier d'entre-eux sont affectés à des squadrons opérationnels, 20% suivant une formation complémentaire dans d'autres pays du Commonwealth, par exemple au Canada ou en Rhodésie, et 20% servant comme cadres ou pilotes instructeurs au sein du RAFVR.

Pour ces raisons, en plus des pertes humaines subies au cours des campagnes antérieures en France (435 pilotes de chasse perdus) et en Norvège, le manque des pilotes suffisament entraînés se fera cruellement sentir, bien plus que celui des avions. Ce manque de personnel deviendra au cours des semaines le principal sujet de préoccupation du maréchal de l'Air Hugh Dowding. En puisant largement dans l'Auxiliary Air Force et le Corps de Réserve, en grattant tous les fonds de tiroirs, celui-ci parvient, le 1er juillet 1940, à rassembler 1,103 pilotes de chasse opérationnels. Le remplacement des pilotes abattus au combat, par des novices peu entraînés et n'ayant pas terminé leur formation, entraînera encore d'énormes pertes, face à des aviateurs allemands plus expérimentés.

Comparativement, la Luftwaffe alligne un plus grand nombre de pilotes de chasse expérimentés, solidement entraînés et formés sur le terrain au cours de la Guerre d'Espagne dans la Légion Condor, en Pologne, en Norvège et en France. L'aviation allemande souffre cependant d'un manque de pilotes de réserve, pour combler les pertes éventuelles, et ainsi sa force de frappe et ses effectifs déclineront progressivement au cours de cette bataille aérienne.

Photo ci-dessous: la Luftwaffe compte un plus grand nombre de commandants compétents, certains eux-mêmes anciens pilotes de chasse confirmés, et d'as ayant combattu lors des campagnes d'Espagne, de Pologne, de Norvège et de France. Par exemples, de gauche à droite, Adolf Galland (III./JG 26), Albert Kesselring (Luftlotte 2) et Hugo Sperrle (Luftflotte 3).



4° Participation de volontaires étrangers.

Le "Royal Air Force Roll of Honor for the Battle of Britain" reconnait officiellement 595 volontaires étrangers, sur un total de 2,936 pilotes de la Royal Air Force et de la Fleet Air Arm ayant effectué des missions de combat entre le 10 juillet et le 31 octobre 1940. Ceux-ci proviennent soit des pays membres du Commonwealth ou des Dominions (Canada, Rhodésie, Australie, Nouvelle-Zélande, Afrique du Sud), soit des pays occupés par l'Allemagne en Europe (Pologne, Belgique, France, Pays-Bas, Danemark, Norvège), soit de pays neutres comme les Etats-Unis ou le Brésil. Le Roll of Honor compte 145 Polonais, 127 Néo-Zélandais, 112 Canadiens, 88 Tchécoslovaques, 32 Australiens, 28 Belges, 25 Sud-Africains, 13 Français, 11 Américains, 10 Irlandais, 1 Palestinien, 1 Rhodésien et 1 Jamaïcain.


Plusieurs pilotes américains servent durant la Bataille d'Angleterre entre juillet et octobre 1940, dispersés au sein des squadrons du RAF Fighter Command. En septembre 1940, est formée la première unité entièrement américaine de la RAF, le Squadron 71. Plus tard, au cours du Blitz, rejoints par de nouveaux volontaires en provenance des Etats-Unis, ces pilotes seront regroupés et formeront les trois "Eagle Squadrons" américains (RAF Squadrons 71, 121 et 133). Déclarés opérationnels en février 1941, ils participeront au Blitz. Certains futurs as de la 8th Air Force, tels Dominic "Don" Gentile, Francis "Gaby" Gabriesky et Donald Blakeslee, ont ainsi combattu sous l'uniforme britannique, bien avant même l'entrée en guerre officielle des Etats-Unis.

Photos ci-dessous: 1° Le Squadron 303 polonais (Hurricane Mk.I), commandé par le Squadron Leader Stanislas Krasnodebski, sera crédité de 126 victoires durant la Bataille d'Angleterre. 2° Le Pilot Officer américain Andrew B. Mamedoff du Squadron 609 canadien, le 14 septembre 1940 (Spitfire Mk.I). Les pilotes américains des Eagle Squadrons combattront sous l'uniforme de la RAF, avant de revêtir celui de l'USAAF, jusqu'en septembre 1942. 3° Pilotes canadiens du Squadron 242 (Hurricane Mk.I) basé à Coltishall, commandé par Douglas Bader, l"as sans jambes", septembre 1940.





Stratégie et ordre de bataille de la Luftwaffe.

La Luftwaffe a été créée à l'origine pour fournir un soutien tactique aux troupes terrestres sur les champs de bataille. Au cours des campagnes de Pologne, du Danemark, de Norvège, et lors de l'offensive à l'Ouest de mai-juin 1940, elle a parfaitement coopéré avec la Wehrmacht dans cette optique. Cependant, précisément pour cette raison, et contrairement à d'autres forces aériennes occidentales, l'Allemagne ne dispose d'aucune aviation de bombardement stratégique. Ce qui, au cours de la Bataille d'Angleterre, posera certains problèmes.

Pour participer à cette campagne, la Luftwaffe a regroupé trois Luftflotten, ou "Flottes aériennes", deux sur les côtes de la Manche, en France, Belgique et Pays-Bas, et une dans le sud de la Norvège. La Luftflotte 2, commandée par le maréchal Albert Kesselring, est responsable du bombardement du Sud-Est de l'Angleterre, et plus particulièrement de la région londonienne. La Luftflotte 3 du maréchal Hugo Sperrle est chargée du Sud-Ouest. Et enfin, la Luftflotte 5, commandée par le général Hans-Jurgen Stumpff, s'occupera des Midlands et du nord de la Grande-Bretagne.

Les trois flottes aériennes rassemblent au total 2,669 avions opérationnels, dont 1,015 bombardiers d'altitude Heinkel He-111, Dornier Do-17 et Ju-88, 346 bombardiers en piquée Ju-87, 375 chasseurs-bombardiers Bf-110 bimoteurs, et 933 chasseurs monomoteurs Bf-109E.

Pour analyser en détail la structure organique et le système d'identification de la Luftwaffe au début de la Seconde Guerre mondiale, voir: Blogosphère Mara, "Luftwaffe à la veille de la Seconde Guerre mondiale".

Blogosphère Mara: Luftwaffe à la veille de la Seconde Guerre mondiale


Luftflotte 2. QG Bruxelles, Belgique. Maréchal de l'Air Albert Kesselring.

La Luftflotte 2 compte 14 groupes de chasse (Jagdgruppen), 18 groupes de bombardement classique (Kampfgruppen), 2 groupes de bombardement en piqué (Sturzkampfgruppen), 4 groupes de chasse-bombardement (Zerstörergruppen), plus une variété d'unités de reconnaissance, de patrouille maritime et de sauvetage en mer.


Elle a réparti ses forces en quatre commandements administratifs:
  • I Fliegerkorps [Corps aérien]. 6 groupes de bombardement (He-111, Ju-88 et Do-17) répartis en deux escadres (Geschwader ou Wing).
  • II Fliegerkorps. 9 groupes de bombardement en trois escadres, 1 groupe de bombardement en piqué (Ju-87B) et 1 groupe expérimental de chasse-bombardement (Bf-109E/Bf-110C).
  • 9 Fliegerdivision. 1 escadre avec 3 groupes de bombardement (He-111, Ju-88 et Do-17).
  • Jagdfliegerführer 2 [Jafü 2]. 14 groupes de chasse (Bf-109E) répartis dans 5 escadres. 5 groupes de chasseurs-bombardiers Zerstörer (Bf-110C) répartis dans 2 escadres. 1 groupe d'instruction/évaluation (Lehrgruppe) (Bf-109E).


I Fliegerkorps. QG Beauvais, France. Général Ulricht Grauert.

  • Kampfgeschwader 1 [KG1]. QG Rosières-en-Santerre. Lieutenant-Colonel Karl Angerstein.
    - Stab./KG1. Rosières-en-Santerre. Lieutenant-Colonel Karl Angerstein. He-111H.
    - Groupe I./KG1. Montdidier. Major Maier. He-111H.
    - Groupe II./KG1. Montdidier. Major B. Kosh. He-111H.
    - Groupe III./KG1. Rosières-en-Santerre. Major W. Fanelsa. He-111H.

  • Kampfgeschwader 76 [KG76]. QG Cormeilles-en-Vexin. Brigadier-Général Stefan Fröhlich.
    - Stab./KG76. Cormeilles-en-Vexin. Brigadier-Général Stefan Fröhlich. Do-17Z.
    - Groupe I./KG76. Beauvais. Capitaine Lindeiner. Do-17Z.
    - Groupe II./KG76. Creil. Major Moericke. Junkers Ju-88A.
    - Groupe III./KG76. Cormeilles-en-Vexin. Major Franz Reuss. Do-17Z.

II Fliegerkorps. QG Gand, Belgique. Général Bruno Loerzer.

  • Kampfgeschwader 2 [KG2]. QG Arras. Lieutenant-Général Johannes Fink.
    - Stab./KG2. Saint-Léger. Lieutenant-Général Johannes Fink. Do-17Z.
    - Groupe I./KG2. Epinoy. Major Martin Gutzmann. Do-17Z.
    - Groupe II./KG2. Saint-Léger. Colonel Paul Weitkus. Do-17Z.
    - Groupe III./KG2. Cambrai/Sud. Major Adolf Fuchs. Do-17Z.

  • Kampfgeschwader 3 [KG3]. QG Le Culot. Colonel Wolfgang von Chamier-Glisczinski.
    - Stab./KG3. Le Culot. Colonel Wolfgang von Chamier-Glisczinski. Do-17Z.
    - Groupe I./KG3. Le Culot. Lieutenant-Colonel Gabelmann. Do-17Z.
    - Groupe II./KG3. Anvers/Deurne. Capitaine Pilger. Do-17Z.
    - Groupe III./KG3. Saint-Trond. Capitaine Rathmann. Do-17Z.

  • Kampfgeschwader 53 [KG53]. QG Lille/Nord. Colonel Erich Stahl.
    - Stab./KG53. Lille/Nord. Colonel Erich Stahl. He-111H.
    - I./KG53. Vitry-en-Artois. Major Erich Kauffmann. He-111H.
    - Groupe II./KG53. Lille/Nord. Major Reinhold Tamm. He-111H.
    - Groupe III./KG53. Lille/Mouveaux. Major Willi Rohrbacher. He-111H.

    Photo ci-dessous: He-111H du KG53 en septembre 1940.


  • Sturzkampfgeschwader 1 [StG1]. QG Mark (Pas-de-Calais). Lieutenant-Colonel Walter Hagen.
    - Groupe II./StG1. Ostende. Capitaine Anton Keil. Ju-87B.

  • Erprobungsgruppe 210 [Epr210]. QG Calais/Marck. Capitaine Walter Rubensdörffer.
    - 1.(Staffel)/EGr210. Calais/Marck. Messerschmitt Bf-110C.
    - 2.(Staffel)/EGr210. Calais/Marck. Messerschmitt Bf-110D.
    - 3.(Staffel)/EGr210. Calais/Marck. Messerchmitt Bf-109E.

  • Lehrgeschwader 1 [LG1]. QG Tramecourt. Major-Général Alfred Bülowius.
    - Groupe IV.(St)/LG1. Tramecourt. Ju-87B.

9 Fliegerdivision. QG Soesterberg, Pays-Bas. Général Joachim Coeler.

  • Kampfgeschwader 4 [KG4]. QG Soesterberg, Pays-Bas. Colonel Hans-Joachim Rath.
    - Stab./KG4. Soesterberg. Colonel Hans-Joachim Rath. He-111P/H.
    - Groupe I./KG4. Soesterberg. Major Meissner. He-111H.
    - Groupe II/KG4. Eindhoven. Lieutenant-Colonel Gottlieb Wolff. He-111P/H.
    - Groupe III./KG4. Amsterdam/Schipol. Capitaine Erich Bloedorn. Ju-88A.

Jagdfliegerführer 2 [Jafü 2]. QG Wissant, France. Colonel Kurt-Bretram von Döring.

  • Jagdgeschwader 3 [JG3]. QG Samer. Lieutenant-Colonel Karl Vieck.
    - Stab./JG3. Wierre-au-Bois. Lieutenant-Colonel Karl Vieck. Bf-109E.
    - Groupe I./JG3. Colembert. Capitaine Günther Lützow. Bf-109E.
    - Groupe II./JG3. Wierre-au-Bois. Capitaine Erich von Selle. Bf-109E.
    - Groupe III./JG3. Desvres. Capitaine Walter Kienitz. Bf-109E.

  • Jagdgeschwader 26 [JG26]. QG Audemberg. Major Gotthardt Handrick.
    - Stab./JG26. Audemberg. Major Gotthardt Handrick. Bf-109E.
    - Groupe I./JG26. Audembert. Capitaine Kurt Fischer. Bf-109E.
    - Groupe II./JG26. Marquise/Est. Capitaine Karl Ebbighausen. Bf-109E.
    - Groupe III./JG26. Caffiers. Major Adolf Galland. Bf-109E.

  • Jagdgeschwader 51 [JG51]. QG Wissant. Lieutenant-Colonel Werner Mölders.
    - Groupe I./JG51. Calais/Pihen. Capitaine Hans-Heinrich Brustellin. Bf-109E.
    - Groupe II./JG51. Marquise/Ouest. Capitaine Günther Matthes. Bf-109E.
    - Groupe III./JG51. St-Omer/Clairmarais. Capitaine Hannes Trautloft. Bf-109E.

  • Jagdgeschwader 52 [JG52]. QG Coquelles. Major Merhart von Bernegg.
    - Groupe I./JG52. Coquelles. Capitaine Siegfried von Eschwege. Bf-109E.
    - Groupe II./JG52. Peuplingne. Capitaine Hans-Günther von Kornatzki. Bf-109E.

  • Jagdgeschwader 54 [JG54]. QG Campagne-les-Guines. Major Martin Mettig.
    - Groupe I./JG54. Guines-en-Calaisis. Capitaine Hubertus von Bonin. Bf-109E.
    - Groupe II./JG54. Campagne-les-Guines. Capitaine Dietrich Hrabak. Bf-109E.
    - Groupe III./JG54. Guines-en-Calaisis. Capitaine Fritz Ultsch. Bf-109E.

  • Lehrgeschwader 2 [LG2]. QG Saint-Omer.
    - Groupe I.(Jagd)/LG2. Wevelghem. Major Hanns Trübenbach. Bf-109E.

  • Zestörergeschwader 26 [ZG26]. Lieutenant-Colonel Joachim-Friedrich Huth.
    - Stab./ZG26. Lille. Lieutenant-Colonel Joachim-Friedrich Huth. Bf-110C.
    - Groupe I./ZG26. St-Omer/Yvrench. Capitaine Wilhelm Makrocki. Bf-110C.
    - Groupe II./ZG26. Crecy-en-Ponthieu. Capitaine Ralph von Rettberg. Bf-110C.
    - Groupe III./ZG26. Arcques/Barley. Capitaine Johann Schalk. Bf-110C.

  • Zestörergeschwader 76 [ZG76]. Major-Général Walter Grabmann.
    - Stab./ZG76. Laval. Major-Général Walter Grabmann. Bf-110C.
    - Groupe II./ZG76. Abbeville. Capitaine Erich Groth. Bf-110C.
    - Groupe III./ZG76. Laval. Capitaine Rolf Kaldrack. Bf-110C.


Luftflotte 3. QG Paris, France. Maréchal de l'Air Hugo Sperrle.

La Luftflotte 3 compte 7 groupes de chasse (Jagdgruppen), 15 groupes de bombardement classique (Kampfgruppen), 8 groupes de bombardement en piqué (Sturzkampfgruppen), et 2 groupes de chasse-bombardement (Zerstörergruppen).


Elle a réparti ses forces en quatre commandements administratifs:
  • IV Fliegerkorps. 6 groupes de bombardement (He-111 et Ju-88) répartis en deux escadres (Geschwader ou Wing).
  • V Fliegerkorps. 9 groupes de bombardement répartis en trois escadres.
  • VIII Fliegerkorps. 8 groupes de bombardement en piqué (Ju-87) répartis en trois escadres.
  • Jagdfliegerführer 3 [Jafü 3]. 7 groupes de chasse (Bf-109E) répartis en trois escadres. 1 escadre avec deux groupes de chasseurs-bombardiers (Bf-110C).

IV Fliegerkorps. QG Dinart, France. Général Kurt Pflugbeil.

  • Lehrgeschwader 1 [LG1]. QG Orleans/Bricy. Colonel Alfred Bülowius.
    - Stab./LG1. Orléans/Bricy. Colonel Alfred Bülowius. Ju-88A et He-111H.
    - Groupe I./LG1. Orléans/Bricy. Capitaine Wilhelm Kern. Ju-88A, He-111H.
    - Groupe II./LG1. Orléans/Bricy. Capitaine Heinz Cramer. Ju-88A.
    - Groupe III./LG1. Chateaudun. Capitaine Karl-Friedrich Knust. Ju-88A.

  • Kampgeschwader 27 [KG27]. QG Tours. Lieutenant-Colonel Bernhard Georgi.
    - Stab./KG27. Tours. Lieutenant-Colonel Bernhard Georgi. He-111P/H.
    - Groupe I./KG27. Tours. Major Ulbricht. He-111P/H.
    - Groupe II./KG27. Dinard. Major Schlichting. He-111P/H.
    - Groupe III./KG27. Rennes. Manfred Speck von Sternberg. He-111P/H.

V Fliegerkorps. QG Villacoublay. Général Robert Ritter von Greim.

  • Kampfgeschwader 51 [KG51]. QG Paris/Orly. Major Hans-Bruno Schulz-Heyn.
    - Stab./KG51. Paris/Orly. Major Hans-Bruno Schulz-Heyn. Ju-88A.
    - Groupe I./KG51. Villaroche. Capitaine Kurt von Greiff. Ju-88A.
    - Groupe II./KG51. Paris/Orly. Major Winkler. Ju-88A.
    - Groupe III./KG51. Etampes/Mondésir. Major Walter Marienfeld. Ju-88A.

  • Kampfgeschwader 54 [KG54]. QG Evreux. Lieutenant-Colonel Otto Höhne.
    - Stab./KG54. Evreux. Lieutenant-Colonel Otto Höhne. Ju-88A.
    - Groupe I./KG54. Evreux. Capitaine Jobst Heinrich von Heydebreck. Ju-88A.
    - Groupe II./KG54. Saint-André. Capitaine Karl-Bernhard Schlaeger. Ju-88A.

  • Kampfgeschwader 55 [KG55]. QG Villacoublay. Lieutenant-Colonel Hans Korte.
    - Stab./KG55. Villacoublay. Lieutenant-Colonel Hans Korte. He-111P/H.
    - Groupe I./KG55. Dreux. Major Joachim Roeber. He-111P/H.
    - Groupe II./KG55. Villacoublay. Major Friedrich Kless. He-111P.
    - Groupe III./KG55. Villacoublay. Major Hans Schemmell. He-111P/H.
    - Groupe IV./KG55. Chartres. Lieutenant-Colonel Joseph Schirmböck. He-111P.

VIII Fliegerkorps. QG Deauville. Général Wolfram Freiherr von Richtofen.

  • Sturzkampfgeschwader 1 [StG1]. QG Angers. Lieutenant-Colonel Walter Hagen.
    - Stab./StG1. Angers. Lieutenant-Colonel Walter Hagen. Ju-87B.
    - Groupe I./StG1. Angers. Major Paul-Werner Hozzel. Ju-87B.
    - Groupe III./StG1. St-Pol. Capitaine Helmut Mahlke. Ju-87B.

  • Sturzkampfgeschwader 2 [StG2]. QG Saint-Malo. Lieutenant-Colonel Oskar Dinort.
    - Stab./StG2. Saint-Malo. Lieutenant-Colonel Oskar Dinort. Ju-87B.
    - Groupe I./StG2. Cherbourg. Capitaine Hubertus Hitschhold. Ju-87B.
    - Groupe II./StG2. Lannion. Capitaine Leonhard Busselt. Ju-87B.
    - Groupe III./StG2. St-Pierre-sur-Dives. Capitaine Heinrich Brücker. Ju-87B.

  • Sturzkampfgeschwader 77 [StG77]. QG Caen. Major Graf Clemens von Schönborn-Wiesentheid.
    - Stab./StG77. Brugy. Major Graf Clemens von Schönborn-Wiesentheid. Ju-87B.
    - Groupe I./StG77. Maltot. Capitaine Helmut Bruck. Ju-87B.
    - Groupe II./StG77. Brugy. Capitaine Waldemar Plewig. Ju-87B.
    - Groupe III./StG77. Argentan. Capitaine Helmut Bode. Ju-87B.

Jagdfliegerführer 3 [Jafü 3]. QG Wissant. Colonel Gert von Massow.

  • Jagdgeschwader 2 [JG2]. QG Evreux. Lieutenant-Colonel Harry von Bülow-Bothkamp.
    - Groupe II./JG2. Beaumont-le-Roger. Capitaine Wolfgang Schnellmann. Bf-109E.

    Photo ci-dessous: Messerschmitt Bf-109E (Emil) du JG2, la version la plus courante du célèbre chasseur allemand employé en août-septembre 1940.


  • Jagdgeschwader 27 [JG27]. QG Cherbourg/West. Lieutenant-Colonel Max Ibel.
    - Groupe I./JG27. Plumetot. Major Eduard Neumann. Bf-109E.
    - Groupe II./JG27. Crepon. Capitaine Ernst Düllberg. Bf-109E.
    - Groupe III./JG27. Carquebut. Capitaine Joachim Schlichting. Bf-109E.

  • Jagdgeschwader 53 [JG53]. QG Cherbourg. Lieutenant-Colonel Hans-Jürgen von Cramon-Taubadel.
    - Stab./JG53. Rennes. Lieutenant-Colonel Hans-Jürgen von Cramon-Taubadel. Bf-109E.
    - Groupe I./JG53. Rennes. Capitaine Lothar von Janson. Bf-109E.
    - Groupe II./JG53. Dinan. Major Freiherr von Maltzahn. Bf-109E.
    - Groupe III./JG53. Brest/Poulmic. Capitaine Harro Harder. Bf-109E.

  • Zestörergeschwader 2 [ZG2]. QG Toussu-le-Noble. Major Friedrich Vollbracht.
    - Stab./ZG2. Toussu-le-Noble. Major Friedrich Vollbracht. Bf-110C.
    - Groupe I./ZG2. Amiens/Glissy. Major Ernst Ott. Bf-110C.
    - Groupe II./ZG2. Guyancourt. Capitaine Harry Carl. Bf-110C.


Luftflotte 5. QG Stavanger, Norvège. Général Hans-Jurgen Stumpf.

La Luftflotte 5 est la plus petite de trois flottes aériennes allignées par l'Allemagne. Elle ne compte qu'un commandement administratif, le X Fliegerkorps. Ses forces sont réparties en deux escadres (4 groupes) de bombardement classique (He-111 et Ju-88), 1 escadre à 3 groupes de chasse (Bf-109E), et 1 groupe de chasse-bombardement (Bf-110C). Plus diverses autres petites unités d'hydravions, de reconnaissance maritime et de sauvetage en mer (He-115).


X Fliegerkorps. QG Stavanger, Norvège. Général Hans Geiseler.

  • Kampfgeschwader 26 [KG26]. QG Stavanger. Major-Général Robert Fuchs.
    - Stab./KG26. Stavanger/Sola. Major-Général Robert Fuchs. He-111H.
    - Groupe I./KG26. Stavanger/Sola. Lt.-Colonel Hermann Busch. He-111H.
    - Groupe II./KG26. Aalborg/West. Major Martin Vetter. He-111H.

  • Kampfgeschwader 30 [KG30]. QG Aalborg. Colonel Herbert Rieckhoff.
    - Stab./KG30. Aalborg/West. Colonel Herbert Rieckhoff. Ju-88A.
    - Groupe I./KG30. Aalborg/West. Major F. Doensch. Ju-88A.
    - Groupe II./KG30. Grove. Capitaine von Symonski. Ju-88A.

  • Jagdgeschwader 77 [JG77]. QG Stavanger. Lieutenant-Colonel Eitel Roediger von Manteuffel.
    - Stab./JG77. Döberitz. Lieutenant-Colonel Eitel Roediger von Manteuffel. Bf-109E.
    - Groupe I./JG77. Aalborg/West. Capitaine Johannes Janke. Bf-109E.
    - Groupe II./JG77. Kristiansand/Kjevik. Capitaine Karl Hentschel. Bf-109E.
    - Groupe III./JG77. Döberitz. Major Heinrich Seeliger. Bf-109E.

    Photo ci-dessous: Messerschmitt Bf-109E du I./JG77.


  • Zestörergeschwader 76 [ZG76]. QG Stavanger. Major-Général Walter Grabmann.
    - Groupe I./ZG76. Stavanger/Forus. Capitaine Graf von Stillfried. Bf-110C.


Système défensif et ordre de bataille de la Royal Air Force.

1° Système Dowding.

Le maréchal de l'Air Hugh Dowding a installé un centre de commandement, de contrôle et de détection dans le batiment abritant le QG du RAF Fighter Command, sur la base de Bentley Priory. La clé de voute de ce centre, installée par Dowding lui-même, c'est l'utilisation de la nouvelle arme technologique: le "système de radio-détection", ou "RAdio Detection And Ranging" (RADAR).

Le RADAR a été breveté en Grande-Bretagne en juin 1935 (British Patent GB593017) par l'ingénieur Sir Robert Watson-Watt, et la Royal Air Force a tout de suite perçu l'importance de ce système de détection. Les Britanniques ont installé sur les côtes sud de l'Angleterre toute une série de tours de détection, appelée la "Chain Home". Ce système permet, en envoyant des ondes électromagnétiques, de détecter les objects métalliques (avions) assez loin pour permettre aux chasseurs Spitfire et Hurricane de les intercepter avant qu'ils atteignent leur objectifs.


Dowding a également installé un centre de contrôle où sont collectées toutes les informations transmises par les observateurs et les contrôleurs radars (équipés de téléphones) sur la côte, puis celles-ci sont retransmisent vers les secteurs et les aérodromes concernés.

Carte ci-dessous: portée de la couverture radar en Grande-Bretagne en juillet 1940.



2° Metropolitan Air Force.

Le RAF Fighter Command de "Stuffy" Dowding a divisé l'espace aérien de la métropole en quatre régions, chacune assignée à un "Group" commandé par un "Air Vice-Marshal", un maréchal de l'Air adjoint.
  • La zone sud-est et la région de Londres sont couvertes par le Group 11. QG Uxbridge, dans le Middlesex. C'est le groupe le plus étoffé.
  • La zone sud-ouest et la Cornouailles par le Group 10, sous les ordres du Vice-Marshal Sir Christopher Quentin "Flossie" Brant. QG RAF Box.
  • Les Midlands et le Pays de Galles par le Group 12, sous les ordres du Vice-Marshal Sir Trafford Leigh-Mallory. QG Watnall, Nottingham.
  • Et enfin l'Ecosse par le Group 13, le moins étoffé, sous l'autorité du Vice-Marshal Richard Ernest Saul. QG Newcastle, Northumberland.

Photo ci-dessous: commandants respectifs du RAF Fighter Command et des Group 10, 11, 12 et 13. De gauche à droite, Sir Hugh C.T. Dowding, Sir Christopher Q. Brand, Sir Keith R. Park, Sir Trafford Leigh-Mallory et Richard E. Saul.


Les groupes sont eux-mêmes divisés en "Secteurs", chacun commandé par un "Group Captain" ou un "Wing Commander", comprenant un aérodrome central (équipé d'une "Sector Operations Room"), d'aérodromes satellites annexes, ainsi qu'entre deux et quatre squadrons. C'est le coeur du système de défense mis en place par Dowding.

Le 12 août 1940, la veille du "Jour de l'Aigle" (Adlertag), le RAF Fighter Command alligne au total 673 chasseurs, dont 221 Spitfire Mk.I répartis dans 19 squadrons, 378 Hurricane Mk.I dans 32 squadrons, ainsi que 6 squadrons de Blenheim Mk.IF et 2 squadrons de Defiant Mk.I.

Photos ci-dessous: un des "oubliés" de la Bataille d'Angleterre, le Boulton-Paul Defiant Mk.I.


Group 10. QG Rudloe Manor, Box, Wiltshire. Maréchal de l'Air Adjoint Sir Christopher Q. "Flossie" Brant.


  • Sector Station Filton. Group Captain Robert Hanmer.
    - Squadron 87 [Nouvelle-Zélande] ("LK"). Exter. Sqn/Ldr Terrence G. Lovell-Gregg. 13 Hurricane Mk.I.
    - Squadron 92 [Canada] ("QJ"). Pembrey. Sqn/Ldr Philip J. Sanders. 12 Spitfire Mk.I.
    - Squadron 213 [Nouvelle-Zélande] ("AK"). Exeter. Sqn/Ldr Hector D. McGregor. 12 Hurricane Mk.I.
    - Squadron 234 ("AZ"). Saint Eval. Sqn/Ldr R.E. Barnett. 10 Spitfire Mk.I.

  • Sector Station Middle Wallop. Wing Commander David Roberts.
    - Squadron 152 ("UM"). Warmwell. Sqn/Ldr Peter K. Devitt. 10 Spitfire Mk.I.
    - Squadron 238 ("VK"). Middle Wallop. Sqn/Ldr Harold Fenton. 12 Hurricane Mk.I.
    - Squadron 604 ("NG"). Middle Wallop. Sqn/Ldr Michael Anderson. 11 Blenheim Mk.IF.
    - Squadron 609 ("PR") [Canada]. Middle Wallop. Sqn/Ldr Horace Darley. 10 Spitfire Mk.I.


Group 11. QG Hillingdon House, Uxbridge, Middlesex. Maréchal de l'Air Adjoint Sir Keith R. Park.


  • Sector Station Debden. Wing Commander Laurence Fuller-Good.
    - Squadron 17 ("YB"). Debden. Sqn/Ldr Cedric W. Williams. 14 Hurricane Mk.I.

  • Sector Station North Weald. Wing Commander Victor Beamish.
    - Squadron 25 ("ZK"). Martlesham Heath. Sqn/Ldr K.A. McEwan. 7 Blenheim Mk.IF.
    - Squadron 56 ("US). North Weald. Sqn/Ldr G.A. Manton. 15 Hurricane Mk.I.
    - Squadron 85 ("VY"). Martlesham Heath. Sqn/Ldr Peter Townsend. 12 Hurricane Mk.I.
    - Squadron 151 ("DZ"). North Weald. Sqn/Ldr E.M. Donaldson. 13 Hurricane Mk.I.

    Photo ci-dessous: Hurricane Mk.I du Squadron 85 en formation, en octobre 1940.


  • Sector Station Hornchurch. Wing Commander Cecil Bouchier.
    - Squadron 41 ("EB"). Hornchurch. Sqn/Ldr H. West. 10 Spitfire Mk.I.
    - Squadron 65 ("YT"). Hornchurch. Sqn/Ldr A.L. Holland. 11 Spitfire Mk.I.
    - Squadron 74 ("JH"). Hornchurch. Sqn/Ldr Francis White. 12 Spitfire Mk.I.

  • Sector Station Biggin Hill. Group Captain Richard Grice.
    - Squadron 32 ("GZ"). Biggin Hill. Sqn/Ldr John Worrall. 11 Hurricane Mk.I.
    - Squadron 501 ("SD"). Gravesend. Sqn/Ldr Harry Hogan. 11 Hurricane Mk.I.
    - Squadron 600 ("QB"). Manston. Sqn/Ldr David Clark. 9 Blenheim Mk.IF.
    - Squadron 610 ("DW"). Biggin Hill. Sqn/Ldr John Ellis. 12 Spitfire Mk.I.

  • Sector Station Kenley. Wing Commander Tom Prickman.
    - Squadron 64 ("SH"). Kenley. Sqn/Ldr Aeneas MacDonell. 12 Spitfire Mk.I.
    - Squadron 111 ("JU"). Croydon. Sqn/Ldr John Thompson. 10 Hurricane Mk.I.
    - Squadron 615 ("KW"). Kenley. Sqn/Ldr Joseph Kayll. 14 Hurricane Mk.I.

  • Sector Station Northold. Group Captain Stanley Vincent.
    - Squadron 43 ("FT"). Northolt. Sqn/Ldr John Badger. 18 Hurricane Mk.I.
    - Squadron 257 ("DT"). Northolt. Sqn/Ldr H. Harkness. 10 Hurricane Mk.I.
    - Squadron 303 [Pologne] ("RF"). Northolt. Sqn/Ldr Z. Krasnodebski. 12 Hurricane Mk.I.

  • Sector Station Tangmere. Wing Commander Jack Poret.
    - Squadron 1 ("JX"). Tangmere. Sqn/Ldr David A. Pemberton. 13 Hurricane Mk.I.
    - Squadron 145 ("SO"). Westhampnett. Sqn/Ldr John R. Peel. 10 Hurricane Mk.I.
    - Squadron 266 ("UO"). Tangmere. Sqn/Ldr R.L. Wilkinson. 13 Spitfire Mk.I.
    - Squadron 601 ("UF"). Tangmere. Sqn/Ldr Edward Ward. 14 Hurricane Mk.I.


Group 12. QG Watnall, Nottingham, Nottinghamshire. Maréchal de l'Air Adjoint Sir Trafford Leigh-Mallory.


  • Sector Station Kirton-in-Lindsey. Wing Commander S. H. Hardy.
    - Squadron 222 ("ZD"). Kirton-in-Lindsey. Sqn/Ldr Johnnie Hill. 14 Spitfire Mk.I.
    - Squadron 264 ("PS"). Kirton-in-Lindsey. Sqn/Ldr Philip Hunter. 12 Defiant Mk.I.

  • Sector Station Digby. Wing Commander Ian Parker.
    - Squadron 29 ("YB"). Digby. Sqn/Ldr S.C. Widdows. 8 Blenheim Mk.IF.
    - Squadron 46 ("PO"). Digby. Sqn/Ldr J.R. MacLachlan. 12 Hurricane Mk.I.
    - Squadron 611 ("FY"). Ternhill. Sqn/Ldr James McComb. 6 Spitfire Mk.I.

  • Sector Station Coltishall. Wing Commander W. K. Beisiegel.
    - Squadron 66 ("LZ"). Coltishall. Sqn/Ldr Rupert Leigh. 12 Spitfire Mk.I.
    - Squadron 242 ("LE")[Canada]. Coltishall. Sqn/Ldr Douglas Bader. 11 Hurricane Mk.I.

  • Sector Station Wittering. Wing Commander Harry Broadhurst.
    - Squadron 23 ("YP"). Collyweston. Sqn/Ldr G. Heycock. 9 Blenheim Mk.IF.
    - Squadron 229 ("RE"). Wittering. Sqn/Ldr H.J. Maguire. 14 Hurricane Mk.I.

  • Sector Station Duxford. Wing Commander A. B. Woodhall.
    - Squadron 19 ("QV"). Fowlmere. Sqn/Ldr P.C. Pinkham. 9 Spitfire Mk.I.
    - Squadron 310 [Tchécoslovaquie] ("NN"). Fowlmere. Sqn/Ldr D. Blackwood. 12 Hurricane Mk.I.


Group 13. QG Newcastle-on-Tyne, Northumberland. Maréchal de l'Air Adjoint Richard E. Saul.


  • Secteur Station Church Fenton. Group Captain C. F. Horsley.
    - Squadron 73 ("TP"). Church Fenton. Sqn/Ldr J. W. More. 11 Hurricane Mk.I.
    - Squadron 249 ("GN"). Church Fenton. Sqn/Ldr Eric King. 11 Hurricane Mk.I.
    - Squadron 302 [Pologne] ("WX"). Leconfield. Sqn/Ldr Jack Satchell. 12 Hurricane Mk.I.
    - Squadron 616 ("QJ"). Leconfield. Sqn/Ldr Marcus Robinson. 12 Spitfire Mk.I.

  • Sector Station Catterick. Wing Commander G.L. Carter.
    - Squadron 54 ("KL"). Catterick. Sqn/Ldr J. Leathart. 11 Spitfire Mk.I.
    - Squadron 219 ("FK"). Leeming. Sqn/Ldr J.H. Little. 10 Blenheim Mk.IF.

  • Sector Station Usworth. Wing Commander Brian Thynne.
    - Squadron 72 ("RN"). Acklington. Sqn/Ldr A. R. Collins. 10 Spitfire Mk.I.
    - Squadron 79 ("AL"). Acklington. Sqn/Ldr Hervey Hayworth. 10 Hurricane Mk.I.
    - Squadron 607 ("AF"). Usworth. Sqn/Ldr James Vick. 12 Hurricane Mk.I.

    Photo ci-dessous: Spitfire du Squadron 72.


  • Sector Station Wick. Wing Commander Geoffrey Ambler.
    - Squadron 3 ("QO"). Wick. Sqn/Ldr S.F. Godden. 10 Hurricane Mk.I.
    - Squadron 232 ("EF"). Sumburgh. Sqn/Ldr M.M. Stephens. 6 Hurricane Mk.I.
    - Squadron 504 ("TM"). Castletown. Sqn/Ldr John Sample. 13 Hurricane Mk.I.

  • Sector Station Dyce. Group Captain Fred Crerar.
    - Squadron 263 ("HE"). Grangemouth. Sqn/Ldr H. Eeles. 4 Hurricane Mk.I.

  • Sector Station Turnhouse. Wing Commander the Duke of Hamilton and Bradon.
    - Squadron 141 ("TW"). Turnhouse. Sqn/Ldr W.A. Richardson. 8 Defiant Mk.I.
    - Squadron 253 ("SW"). Turnhouse. Sqn/Ldr Tom Gleave. 12 Hurricane Mk.I.
    - Squadron 602 ("LO"). Drem. Sqn/Ldr A.V. Johnstone. 11 Spitfire Mk.I.
    - Squadron 603 ("XT"). Turnhouse. Sqn/Ldr George Denholm. 11 Spitfire Mk.I.
    - Squadron 605 ("UP"). Drem. Sqn/Ldr Walter Churchill. 14 Hurricane Mk.I.


Déroulement de la Bataille d'Angleterre.

La Bataille d'Angleterre se divise en quatre phases:

  • Du 10 juillet au 12 août 1940, la "Bataille de la Manche" ou Kanalkampf.
  • Du 13 au 23 août 1940, l'offensive initiale allemande, l'"Attaque de l'Aigle" ou Adlerangriff, contre les aérodromes du RAF Fighter Command et les installations radar sur la côte sud de l'Angleterre.
  • Du 24 août au 6 septembre 1940, les attaques de la Luftwaffe menées contre toutes les bases aériennes britanniques. C'est la phase la plus critique de la bataille.
  • A partir du 6 septembre 1940, le bombardement des industries et des villes anglaises, en particulier de Londres. C'est le début du Blitz, qui se poursuivra jusqu'en mai 1941.

1° Bataille de la Manche (10 juillet au 12 août 1940).

La bataille d'Angleterre débute officiellement le 10 juillet 1940, avec l'attaque d'un convoi britannique au large de Douvres par des Dornier Do-17Z du KG2, escortés par des Bf-110C du ZG26 et des Bf-109E du JG3. Ce premier raid aérien allemand est conforme à l'ordre d'opération donné par le commandement de la Luftwaffe, le 2 juillet: offensive simultannée contre les navires britanniques dans la Manche et les chasseurs de la Royal Air Force dans le ciel.

Pour riposter contre les attaques de convois, le RAF Fighter Command prône sa tactique habituelle: engager les bombardiers ennemis avec les Hurricane, pendant que les Spitfire se chargent des chasseurs d'escorte. Mais dans les faits, les pilotes s'en tiendront à cette tactique qu'occasionnellement, les Hurricane se mesurant aux chasseurs Messerschmitt aussi souvent que les Spitfire.

Ces premiers combats aériens n'atteignent pas encore l'intensité de ceux qui marqueront la suite des évenements, dans les semaines à venir, mais ils donnent déjà un avant-goût saumâtre aux pilotes du RAF Fighter Command, sur ce qui les attend. En effet, beaucoup de jeunes novices, inexpérimentés, disparaissent au cours de leur premier engagement dès cette période.

Le convoi CW-9, parti de Medway le 7 août 1940, avec 20 navires marchands et 7 navires d'escorte de la Royal Navy, est attaqué la nuit suivante par une meute de U-Bootes, et perd trois de ses bâtiments. A l'aube du 8 août, le maréchal Hugo Sperrle, commandant de la Luftflotte 3, ordonne à ses bombardiers d'achever le convoi, qui se trouve au large de Brighton.

Les navires britanniques sont pris à partie par plus de 60 Ju-87B des StG1, StG2 et StG77, tandis que d'autres bombardiers en piqué attaquent plusieurs tours radar de la Chaine Home sur la côte. 4 navires marchands sont coulés, et de nombreux autres tentent de gagner des ports côtiers tant bien que mal. Seuls 4 d'entre-eux, sur les 20 du départ, atteignent leur destination, Swanage dans le Dorset.

Des Hurricane du Squadron 145 interceptent pendant cette attaque les Stuka, et leurs pilotes revendiquent le destruction de 21 bombardiers ennemis (le score réel étant de 11).

C'est également au cours de cette période que les Defiant et Messerschmitt Bf-110 commencent à montrer des signes de leur vulnérabilité, lors des combats aériens (dogfighting), face à des chasseurs beaucoup plus rapides et manoeuvrables.

Photo ci-dessous: les Defiant, trop lent, souffriront d'énormes pertes face aux Messerschmitt Bf-109. Ici, deux d'entre-eux du Squadron 264 abattus dans la journée du 28 août 1940. Ils seront bien vite retirés des unités opérationnelles.



2° Attaque de l'Aigle (13-23 août 1940).

Les attaques initiales de la Luftwaffe contre les terrains d'aviation britanniques sur la côte portent le nom de code d'Adlerangriff ou "Attaque de l'Aigle".

La veille du déclenchement de cette offensive aérienne, le 12 août 1940, des Bf-110 Zerstörer de l'Erprobungsgruppe 210 mènent des attaques préventives contre quatre stations radar.

Le 13 août 1940, c'est l'Adlertag, le "Jour de l'Aigle", nom donné à cette première journée d'offensive de la Luftwaffe. Il avait été fixé auparavant au 10 août, mais ensuite repoussé en raison de mauvaises conditions météorologiques. Le maréchal Hermann Goering entame donc la destruction de la Royal Air Force sur ces aérodromes, en préparation de l'opération Seelöwe.

Les objectifs d'Adlertag sont les terrains d'Hawkinge, Manston, Kenley, North Weald, Biggin Hill et Hornchurch, et les stations radars de Lydd, Lympne, Manston et Douvres. La station radar de Douvres est détruite, et les aérodromes de Manston et de Biggin Hill fortement endommagés. Au cours de cette première journée, les Allemands engagent 1,485 avions, et en perdent 45. Le RAF Fighter Command, de son côté, enregistre la perte de 13 chasseurs et 7 pilotes.


Au cours de cette seconde phase de la Bataille d'Angleterre, les Allemands mettent maintenant en évidence toutes les "imperfections" de la Luftwaffe. Par exemple, le Ju-87B Stuka, qui a une vitesse maximale de 300 km/h et n'atteint qu'une altitude maximale de 3,500 mètres, et qui avait fait régner la terreur lors des campagnes de Pologne et de France, est maintenant une proie facile pour les chasseurs Spitfire et Hurricane beaucoup plus rapides (600 km/h pour l'un, 510 km/h pour l'autre), plus manoeuvrables et qui grimpent sans difficulté à 4,000 ou 5,000 mètres d'altitude.

Il en est de même pour les chasseurs bimoteurs Bf-110 Zerstörer, bien armés et assez rapides, mais qui manquent de souplesse et de manoeuvrabilité. Les bombardiers tactiques allemands ne transportent qu'une charge maximale de 2,000 kg de bombes pour le He-111, 1,800 kg pour le Ju-88 et 1,000 kg pour le Do-17, donc une capacité de destruction assez réduite pour le risque qu'ils encourent d'être abattus avant d'atteindre leurs objectifs.

Pour finir, l'autonomie limitée des Bf-109E ne leur permet qu'au maximum 20 minutes de combat contre les chasseurs britanniques. Malgré ces infériorités, Goering et le commandement de la Luftwaffe se donnent quatre jours pour détruire les aérodromes au sud de la ligne Londres-Gloucester, et quatre semaines pour éliminer complètement la Royal Air Force.

Photo ci-dessous: une formation de He-111 franchit la Manche pour bombarder les terrains d'aviation du RAF Fighter Command.


Le 15 août 1940, c'est le point culminant d'Adlerangriff. Intervient pour la première fois de la Bataille d'Angleterre la Luftflotte 5, stationnée en Norvège et au Danemark, contre les terrains d'aviation en Ecosse. Au cours de cette journée, Au cours de la journée, la Luftwaffe effectue sept raids et 1790 sorties sur l'Angleterre.

Toutes les missions de la Luftwaffe, commencées à 11h30 et terminées vers 18h30, se heurtent à une violente réaction de la Royal Air Force et de la DCA britannique. Bilan de cette journée: La Royal Air Force perd 34 avions, les Allemands enregistrent la perte de 75 avions.

Le 17 août 1940, toutes les missions programmées sont annulées en raison des conditions météorologiques déplorables.

Le 18 août 1940, la Luftwaffe déclenche de très violentes attaques contre les terrains d'aviation de West Malling, Biggin Hill, Kenley et Croydon. Elle y laisse 53 avions, contre 31 pour la Royal Air Force.

Depuis le 13 août 1940, les Allemands ont déjà perdu 230 avions. Pour les Ju-87B Stuka, c'est la journée la plus noire de la bataille. Goering les faits retirés des unités opérationnelles. En ce qui concerne les Bf-110, qui ont subi de lourdes pertes en affrontant en combat aérien les chasseurs britanniques, ceux-ci ne seront plus utilisés qu'exclusivement dans le rôle d'escorteurs des bombardiers.

Durant la même période, les Britanniques ont enregistré la perte de 104 Spitfire et Hurricane, sur les 673 chasseurs des effectifs de départ du RAF Fighter Command, c'est énorme!

Goering prend une autre décision, lourde de conséquences: déçu par les performances des Bf-109, il ordonne à ceux-ci de ne plus chercher l'affrontement avec les Spitfire (Sweep, ou "Chasse libre"), et de ne plus se consacrer qu'à des missions d'escorte de bombardiers, ce qui rend furieux la plupart des pilotes de chasse allemands. Il fait porter l'essentiel des attaques par la Luftflotte 2, et les chasseurs de la Luftflotte 3 sont transférés pour renforcer les bases de chasse dans le Pas-de-Calais. Les bombardiers de la Luftflotte 3, désormais sans chasseurs de protection, se concentrera dans des attaques nocturnes.

Le commandant de la Luftwaffe procède également à des remaniement dans les postes de commandement, au niveau des Geschwaders (escadres) de chasse, en remplaçant les anciens par des plus agressifs, tels Adolf Galland et Werner Mölders.

Photo ci-dessous: Bf-109E du JG51 "Mölders" sur l'aérodrome de Wissant, août-septembre 1940.



3° Attaques contre l'ensemble des aérodromes anglais (24 août - 6 septembre 1940).

Interrompue le 19 août 1940 en raison des mauvaises conditions météorologiques, l'offensive aérienne allemande reprend de plus belle. Cette fois, Goering ordonne d'attaquer tous les aérodromes britanniques, les infrastructures portuaires et les industries aéronautiques.

Donc attaque massive de la Luftwaffe contre les terrains d'aviation de North Weald, Hornchurch, Manston, Biggin Hill, des centres de commandement du RAF Fighter Command, et les ports de Douvres, Ramsgate et Portsmouth. La Luftwaffe effectue 1390 sorties et perd 52 avions. Le RAF Fighter Command enregistre la perte de 27 avions.

Cette troisième phase de la bataille d'Angleterre est la plus intensive et la plus critique. Sur les 33 raids aériens allemands menés au cours des deux semaines suivantes, 22 le seront contre des aérodromes britanniques. Biggin Hill et Hornchurch seront touchés chacun à quatre reprises. Debden et North Weald, deux fois. Croydon, Gravesend, Rochford, Hawkinge et Manston, seront également atteints.

Sont également visés certaines bases du RAF Coastal Command, comme Eastchurch. Les pilotes du RAF Fighter Command, qui cumulent parfois jusqu'à quatre ou cinq sorties dans la même journée, commencent à craquer nerveusement. Les jeunes pilotes provenant des Operational Training Units, qui remplacent leurs homologues abattus ou au bout du rouleau, n'ont bien souvent que 9 ou 10 heures de vol à leur actifs, et face à des pilotes expérimentés comme Galland, Mölders et d'autres as, ils deviennent des proies très faciles.

Dans la nuit du 24 au 25 août, survient un évenement qui va changer le cours de la bataille: plusieurs avions allemands (jamais identifiés) larguent par erreur plusieurs bombes sur le quartier de Harrow, dans la banlieue londonienne. En représailles, le Premier ministre Winston Churchill donne l'ordre au RAF Bomber Command de bombarder Berlin.

Dans l'après-midi du 25 août 1940, la Luftwaffe s'en prend à l'aérodrome de Warmwell et aux ports de Douvres et de l'estuaire de la Tamise. Les Allemands perdent 20 avions, les Britanniques 16.

Le 26 août 1940, sont visés les terrains de Biggin Hill, Kenley, Debden, North Weald, Warmwell et Hornchurch. Les installations portuaires de Douvres, Saint-Eval, Barnemouth et Plymouth. Le soir, la Luftwaffe a perdu 41 avions. Le RAF Fighter Command, 31.

En représaille du bombardement de Londres par la Luftwaffe, deux nuits plus tôt, 81 bombardiers moyens Wellington, Whitley et Hampden s'en prennent pour la première fois de la guerre à Berlin. Les dégâts sont minimes. Mais c'est une giffle magistrale à la figure du maréchal de l'Air Hermann Goering, qui avait proclamé précédement: "Si un seul bombardier britannique parvient à franchir la Ruhr, appelez-moi Meyer!"

Le 28 août 1940, la Luftwaffe s'acharne contre les aérodromes d'Eastchurch et de Rochford, qui appartiennent au RAF Coastal Command. Bilan de la journée: 30 avions allemands abattus, 28 britanniques.

Le 30 août 1940, les bombardiers allemands s'en prennent aux terrains de Biggin Hill et de Kenley, aux centres radar de Dover, Rye, Pevensey, Foreness, Beachy Head, Forelight et Whitsable. Biggin Hill est bombardée deux fois de suite dans la même journée. Les Allemands perdent 36 avions, les Britanniques 25.

Le 31 août 1940, des avions de reconnaissance britanniques signalent la présence, dans les ports français, belges et néerlandais, de nombreux moyens de débarquement allemands, de toute forme et de toute taille.

En Grande-Bretagne, les Allemands poursuivent leurs raids contre les aérodromes de North Weald, Hornchurch, Biggin Hill, déjà touché la veille, Croydon, Debden et Detling. Ils causent également des dommages importants à cinq centres d'opérations: Rye, Pevensey, Beachy Head, Foreness et Whitstable. Au cours de cette journée, le RAF Fighter Command perd 39 avions, contre 41 pour la Luftwaffe.

Le 1er septembre 1940, nouvelle incursion de la Luftwaffe contre Biggin Hill, touché pour la quatrième fois en trois jours. Les Allemands bombardent également Eastchurch, Detling, Lympne et Hawkinge.

Le Ministère de la production aéronautique, "Ministry of Aircraft production", dirigé par William Maxwell "Lord Beaverbrook" Aitkens, a réalisé de véritables prouesses, en arrivant, depuis le déclenchement de l'Adlerangriff le 13 août, à combler tant bien que mal les pertes en chasseurs du RAF Fighter Command.

Les Britanniques ont cependant un énorme avantage sur les Allemands: ils combattent au-dessus de leur territoire. Les pilotes qui parviennent à sauter en parachute regagnent leur unités au bout de quatre ou cinq heures seulement, alors que les pilotes et équipages abattus de la Luftwaffe sont irrémédiablement perdus.

Malgré la prouesse de lord Beaverbrook, les Allemands ont complètement désorganisé les liaisons entre les différents centres de commandement de la Royal Air Force, sévèrement endommagés la plupart des aérodromes du Groupe 11 et des stations radar sur la côte sud de l'Angleterre.

La situation du RAF Fighter Command devient critique, surtout en ce qui concerne les pilotes. Il lui manque maintenant environ 300 pilotes, et les autres sont nerveusement au bout du rouleau. Il se voit contraint de puisser dans les autres commandements, comme le RAF Coastal Command, et surtout de rendre opérationnelles de nouvelles escadrilles étrangères, toujours à l'entraînement.

C'est ainsi qu'environ 200 pilotes belges, français, tchèques, polonais, australiens, rodhésiens, sud-africains, néo-zélandais, et même une poignée d'Américains, viennent renforcer le dispositif anglais sur le point de lâcher prise. C'est un véritable ballon d'oxygène pour Dowding. Mais c'est Adolf Hitler lui-même qui offrira bientôt aux Britanniques une occasion inespérée de souffler et de se ressaisir.

Photo ci-dessous: un vétéran de la Bataille d'Angleterre restauré, le 20 août 2006.


Le 2 septembre 1940, la Luftwaffe poursuit ses attaques. Ses objectifs du jour sont Biggin Hill, touché pour la cinquième fois en quatre jours, Rochford, North Weald, Debden, Eastchurch, Hornchurch, Kenly, Digby et Detling. Les Allemands perdent 35 avions. Les Britanniques, 31.

Le 3 septembre 1940, les terrains de North Weald, Hornchurch et Debden sont sévèrement endommagés. Les Allemands et les Britanniques perdent chacun 16 avions.

Le 4 septembre 1940, à Berlin, Adolf Hitler déclare: "J'ai tenté d'épargner les Britanniques. Ils ont pris mon sens de l'humanité pour de la faiblesse et répondent en assassinant des femmes et des enfants allemands. Je raserai leurs villes..." Au cours de la nuit suivante, les Allemands larguent des fusées éclairantes au-dessus de Londres.

Le 5 septembre 1940, la Luftwaffe "revisite" les aérodromes de Croydon, Lympne, North Weald, Biggin Hill et Eastchurch. Les Allemands perdent 23 avions, le RAF Fighter Command 20.

Le 6 septembre 1940, les bombardements sur les installations portuaires de la côte sud de l'Angleterre font déclencher l'alerte du second degré, qui signifie: "attaque terrestre probable dans les trois jours". Biggin Hill est touché pour la septième fois en une semaine. Les Allemands enregistrent la perte de 35 avions. Les Britanniques, 23.


4° Blitz (6 septembre - 31 octobre 1940).

Dans la nuit du 6 au 7 septembre 1940, 350 bombardiers He-111, Do-17 et Ju-88 de la Luftwaffe, escortés par 600 chasseurs Bf-109 et Bf-110, se succèdent au-dessus de Londres et déversent 337 tonnes de bombes, en prenant pour cibles prioritaires l'arsenal de Woolwich et les docks construits le long de la Tamise.

Hitler ordonne ainsi, au moment même où le RAF Fighter Command a les genoux à terre et est sur le point de succomber, un changement radical à la Luftwaffe: ses objectifs ne seront plus les terrains d'aviation britanniques, mais les principaux centres hurbains et les industries aéronautiques. Il met en application la promesse qu'il avait fait aux Allemands dans son discours du 4 septembre: "Je raserai leurs villes." C'est le début officiel du "Blitz". Il durera jusqu'en mai 1941.

Photo ci-dessous: l'hôpital Saint Thomas, à proximité de la Chambre des Représentants du Parlement britannique, bombardé pour la première fois par la Luftwaffe le 8 septembre 1940.


A 20h, les commandants en chef des trois forces armées britanniques diffusent un message réduit au seul nom de code "Cromwell", c'est-à-dire "Invasion ennemie probable dans les vingt-quatre heures". Durant cette journée, les Allemands perdent 37 avions, contre 24 pour les Britanniques.

le 15 septembre 1940 marque le plus grand combat aérien de la Bataille d'Angleterre. Pendant toute cette journée et la nuit suivante, la Luftwaffe s'acharne sur Londres. Les destructions et les pertes civiles sont catastrophiques, mais les points sensibles de la capitale ne sont pas touchés. D'autres bombardiers allemands cherchent à atteindre les usines aéronautiques de Southampton, mais se heurtent à une violente réaction de la DCA britannique.



5° La théorie controversée du "Big Wing" de Leigh-Mallory (15 septembre 1940).

Ce même jour, Douglas Bader et Leigh-Mallory mettent en application leur théorie du "Big Wing", qui par la suite fera l'objet d'une controverse entre les Groups 11 (Keith Park) et 12 (Leigh-Mallory). Les interceptions du RAF Fighter Command ne s'effectuent plus par sections ou squadrons, jetés dans la bataille ici et là séparément et de manière non-coordonnés, mais désormais par formation de quatre ou cinq squadrons, avec une soixantaine de chasseurs. Le problème est que pour les rassembler, il faut beaucoup de temps, ce qui laisse habituellement le temps à la Luftwaffe de s'échapper et de rentrer à ses bases. La première mission du Big Wing est menée par Bader à la tête des Squadrons 242, 302, 310, 19 et 611, avec des résultats mitigés: cinq bombardiers et un chasseurs allemands abattus, pour la perte de deux avions anglais.

Au cours de la nuit du 15 au 16 septembre 1940, Bristol, Cardiff, Liverpool et Manchester sont également bombardés. Les Allemands engagent au cours de cette journée 830 bombardiers et 700 chasseurs de protection. Ils déplorent la perte de 66 avions. Contre 27 seulement pour le RAF Fighter Command.

Alors que Goering pensait donner le coup de grâce à l'aviation de chasse britannique, la journée s'achève par une victoire de la Royal Air Force. Désormais, les Allemands renoncent aux raids diurnes, trop coûteux. A ce stade, il est clair que les Britanniques ont désormais remporté la "Bataille aérienne d'Angleterre" et ont survécu.

A partir de cette date, pour échapper aux chasseurs britanniques, la Luftwaffe interviendra exclusivement de nuit, par vagues de 150 à 200 bombardiers à chaque mission. Le Blitz tuera au total 50,000 civils britanniques.

Même si des attaques allemandes contre les aérodromes britanniques se poursuivront, avec une moindre intensité, jusqu'en novembre 1940, la "Bataille aérienne d'Angleterre" se termine officiellement le 31 octobre. Pour leur part, les bombardements nocturnes de Londres se poursuivront (Mini-Blitz) jusqu'en mai 1941.





Bilan et pertes.

Depuis le 13 août, "Jour de l'Aigle", la Luftwaffe a complètement désorganisé les centres de commandement, endommagé la majorité des terrains d'aviation britanniques, et détruit 426 chasseurs de la Royal Air Force. Du 10 juillet au 15 septembre 1940, l'aviation allemande a perdu, selon ses propres statistiques, 1,636 chasseurs et bombardiers avec leurs équipages. Soit 47% des chasseurs monomoteurs (Bf-109), 60% des chasseurs bimoteurs (Bf-110), et 45% des bombardiers moyens (He-111, Ju-88 et Do-17) engagés.

Winston Churchill et Sir Hugh Dowding peuvent se réjouir d'un fait indiscutable: la Royal Air Force a survécu à l'offensive aérienne allemande, la Grande-Bretagne est sauvée! C'est la première défaite militaire de l'Allemagne nazie au cours de la Seconde Guerre mondiale, un an après son commencement. Le Premier ministre britannique prononce d'ailleurs à la BBC une allocution mémorable pour qualifier les actions des pilotes britanniques et étrangers: "Jamais dans l'histoire des conflits humains un aussi grand nombre de personnes n'auront dû leur salut à un si petit nombre!"





Série documentaire "Grandes Batailles de la Seconde Guerre mondiale"
(Henri de Turenne et Daniel Costelle) - Vidéo Youtube.


"Les Grandes Batailles" est une série d'émissions télévisées historiques de Daniel Costelle, Jean-Louis Guillaud et Henri de Turenne diffusée à la télévision française dans les années 1960 et 1970, qui décrit les principales batailles de la Seconde Guerre mondiale ainsi que le procès de Nuremberg. Les émissions donnent la parole aux officiers ayant participé à ces batailles ainsi qu'à des historiens. Ces interventions alternent avec des extraits de reportages. Les commentaires sont d'Henri de Turenne.


La Bataille d'Angleterre (10 juillet - 31 octobre 1940).











Article modifié le 10 mai 2016.


Sources principales:
Battle of Britain (Wikipedia.org)
RAF: the Battle of Britain (raf.mod.uk)

10 mai - 25 juin 1940 - Bataille de France: offensive allemande sur le front Ouest

Le 10 mai 1940, à 5h35 du matin, les Allemands déclenchent Fall Gelb, le "Plan Jaune": l'invasion des Pays-Bas, de la Belgique, du Grand-duché de Luxembourg et de la France. Sept mois après la déclaration de guerre de la Grande-Bretagne et de la France à l'Allemagne, celle-ci met soudainement fin à la "Drôle de guerre". Chronologiquement, la "Bataille de France" se déroulera en deux étapes principales. D'abord Fall Gelb, le "Plan Jaune", c'est-à-dire l'invasion initiale de la Belgique et des Pays-Bas jusqu'à l'encerclement du Corps expéditionnaure britannique et d'une partie de l'armée française dans la poche de Dunkerque. En second lieu, Fall Rot, le "Plan Rouge" déclenché le 5 juin 1940, la conquête du reste de la France, jusqu'à sa capitulation complète.



Drôle de guerre.

Entre la déclaration de guerre franco-britannique, le 3 septembre 1939, et le déclenchement de l'offensive générale allemande sur le front occidental, le 10 mai 1940, s'est instaurée une période d'accalmie appellée "Drôle de Guerre" (Phoney War ou Sitzkrieg).

Bien que l'essentiel de l'Armée allemande soit engagée en Pologne, et malgré les deux alliances militaires anglo-polonaise et franco-polonaise, la France et la Grande-Bretagne restent cantonnés sur la défensive, dans les fortifications de la Ligne Maginot qui s'étant de Bâle, sur la frontière suisse, jusqu'à Sedan, sur la Meuse. Dans les faits, ils abandonnent la Pologne à son sort.

Le 7 septembre 1939, deux corps d'armée comprenant neuf divisions françaises entament bien une offensive en Allemagne, l'Opération Sarre, mais le commandant suprême français lui-même, le général Maurice Gamelin, n'y croit pas trop. Cette offensive si prometteuse se transforme très vite en "promenade militaire" et avance à l'allure d'escargot. Après avoir progressé de 8km en Allemagne, en deux semaines et pratiquement sans rencontrer d'opposition sérieuse, Gamelin ordonne le retrait général. Le 30 septembre, les derniers soldats français repassent la frontière allemande et regagnent leurs casernement dans la Ligne Maginot.

Par la faute des hésitations et de l'incompétence de l'état-major français, c'est la fin d'une opportunité extraordinaire d'envahir l'Allemagne, et une formidable occasion manquée de mettre un terme à la Seconde Guerre mondiale, moins d'un mois après qu'elle a commencé.

Photo ci-dessous: un soldat français (151ème R.I., 42ème Division d'infanterie) en territoire allemand, pendant l'offensive Sarre, le 9 septembre 1939.



Plan Schlieffen de 1914 révisé: plans Halder et von Manstein.

Le 6 octobre 1939, Adolf Hitler adresse aux deux alliés occidentaux une offre de paix. Trois jours plus tard, dans le cas d'une réponse négative, il signe sa directive n°6 (Führer-Anweisung N°6) et ordonne au Commandement suprême militaire allemand (OKH) de préparer les plans d'une campagne sur le front occidental, dans l'intention d'écraser la France et la Grande-Bretagne. Hitler pose la défaite des deux puissances occidentales comme condition préliminaire à ses futures opérations de conquête de l'Union Soviétique.

Photos ci-dessous: 1° Général Franz Halder, chef d'état-major du Commandement militaire allemand en 1939-1940. 2° Maréchal Gerd von Rundstedt, commandant en Chef du Heeresgruppe A. 3° Erich von Manstein, concepteur du plan "Coup de faucille".


Carte ci-dessous: évolution des plan de Fall Gelb en 1939-1940, et le plan original Schlieffen de 1914.


Les plans d'opération d'Halder sont largement inspirés du plan Schlieffen. En août 1914, au début de la Grande Guerre, l'Armée impériale allemande avait pénétré en Belgique et traversé le massif des Ardennes. Dans un gigantesque mouvement tournant par le nord, avec Paris et la Marne comme pivot, après avoir percé l'aile gauche de l'armée française, concentrée dans l'Est de la France, son intention était alors de la prendre entièrement au piège en Alsace-Lorraine en atteignant la frontière suisse.


Hitler juge irréaliste ce plan, les effectifs de la Wehrmacht étant alors insuffisants pour le mener à bien. Il estime que l'armée allemande ne sera pas prête pour un plan de cet envergure avant 1942! Or il veut une offensive dans les plus brefs délais et une victoire rapide, avant que la période d'impréparation des Alliés ne prenne fin. Il avance une première date de l'offensive fixée le 12 novembre. Mais celle-ci sera à plusieurs reprises ajournées, les militaires parvenant à convaincre Hitler qu'ils ont besoin de plus de temps pour se préparer.

Le 29 octobre 1939, l'OKH lui présente donc un Plan Jaune modifié, en ajoutant une attaque secondaire (diversion) sur l'axe Liège-Namur. Mais Hitler n'est pas le seul à critiquer le plan d'Halder. Le maréchal Gerd von Rundstedt, commandant du Heeresgruppe A, est également en désaccord avec le chef d'état-major de l'OKH. A la différence d'Hitler, en soldat professionnel, celui-ci cherche avant tout à l'améliorer au lieu de le rejeter en bloc.

Le 31 octobre 1939, le lieutenant-général Eric von Manstein, le chef d'état-major du Heeresgruppe A de von Rundstedt, partisan acharné des nouveaux préceptes de la doctrine d'emploi des blindés et de la guerre de mouvements, présente un autre plan alternatif, désigné "Plan Coup de Faucille" (Fall Sichelschnitt).

Des divisions panzers, sous le couvert du massif forrestier ardennais, devront progresser, rapidement et discrètement, vers la Meuse et la Sambre, dans un secteur réputé peu pratiquable pour les unités mécanisées et faiblement défendu, entre Dinant et Sedan, où prend fin la Ligne Maginot. Là, elles devront effectuer un "mouvement tournant" et foncer direction nord-ouest vers la Manche, de manière à enfermer dans une énorme poche, la "Nasse Belge", les armées françaises et le Corps Expéditionnaire Britannique (BEF) de Lord Gort, qui auront appliqué le "Plan Dyle" et s'y seront imprudemment engoufrées. Cette manoeuvre de von Manstein, de par sa hardiesse et son effet de surprise tactique, enthousiasme Hitler qui l'impose aux militaires allemands réticents.


Ordres de bataille allemand et alliés.

1° Allemagne.

L'Allemagne nazie a déchiré le Traité de Versaille et rétablit la conscription militaire en 1935. Le 10 mai 1940, le Haut-Commandement militaire (OKH) dispose au total de 157 divisions. Un effectif total de 5.4 millions d'hommes, dont environ trois millions vont être engagé dans la bataille sur le front occidental. 79 de ces divisions ont complété leurs formations ou leur instruction. 14 autres sont assignées au Heeresgruppe C disposé face à la Ligne Maginot, et ne prendront pas part aux opérations initiales.

La Wehrmacht va donc engager sur le Front Ouest 93 divisions, dont dix de panzers et six motorisées. 39 d'entre-elles sont des unités de réserves. Et environ un quart des troupes allemandes engagées sont constituées de vétérans de la Première Guerre mondiale, âgés de 40 ans ou plus. Elle dispose au total sur le front occidental de 2,700 chars et canons autopropulsés.

Carte ci-dessous: disposition des forces en présence le 10 mai 1940. En traits rouges: le Plan Coup de Faucille de von Manstein.


Les dix divisions panzers allignent 2,574 chars sur le front occidental le 10 mai 1940, dont 523 Panzer-I ou Panzerkampfwagen I (PzKpfw I), 955 Panzer-II (PzKpfw II), 343 Panzer-III (PzKpfw III) et 278 Panzer-IV (PzKpfw IV), ainsi que 106 Panzer 35(t) et 228 Panzer 38(t) d'origine tchèque.

Photos ci-dessous: respectivement Panzer-I, Panzer-II, Panzer-III, Panzer-IV, Panzer 35(t) et Panzer 38(t).







La Luftwaffe, de son côté, a divisé ses forces en deux groupes. Le premier, avec 1,815 avions de combat, 487 avions de transport et 50 planeurs, est destiné au soutien du Heeresgruppe B. Le second, 3,826 avions de combat, est assigné aux Heeresgruppen A et C.

Photo ci-dessous: quelques-uns des modèles d'avions les plus courants de la Luftwaffe en mai-juin 1940. 1° Junker Ju-87B Stuka, ici photographiés durant la campagne de Pologne. 2° Messerschmitt Bf-109E Emil. 3° Heinkel He-111E.




Au nord du dispositif allemand, le Heeresgruppe B du maréchal Fedor von Bock, qui rassemble 30 divisions disposées sur toute la longueur de la frontière hollandaise, de la Mer du Nord jusqu'à Aix-la-Chapelle.

Au centre, dans le Schnee Eifel, le long des frontières belges et luxembourgeoises, le Heeresgruppe A de Gerd von Rundstedt rassemble 45 divisions, dont le groupement blindé Guderian, avec sept divisions panzers. Disposées du nord au sud, les 4ème, 12ème et 16ème Armées allemandes, commandées par les généraux Günther von Kluge, Wilhelm List et Ernst Busch. Le fer de lance est bien sûr les unités blindées, réparties en trois Korps motorisés, chargées de s'emparer des ponts sur la Meuse.

Au sud du dispositif allemand, le long du Rhin et de la ligne Maginot, le Heeresgruppe C de Wilhelm von Leeb, constitué des 1ère et 7ème Armées allemandes, avec 14 divisions, chargé de fixer le plus grand nombre possible de divisions françaises sur la Ligne Maginot, de la Moselle jusqu'à Bâle, sur la frontière suisse.


2° Force Expéditionnaire britannique.

La Force Expéditionnaire britannique, commandée par Lord Gort, alligne en France douze divisions d'infanterie, et une brigade blindée, réparties en trois corps d'armées, avec un effectif total de 316,000 hommes. Le I Corps, commandé par le lieutenant-général Michael Barker (puis le major-général Harold Alexander). Le II Corps, commandé par le lieutenant-général Alan F. Brooke (puis le major-général Bernard Montgomery). Et le III Corps, commandé par le lieutenant-général Ronald Adam.

La BEF dispose également d'une composante aérienne, répartie en deux ensembles, l'Air Component et la RAF Advanced Air Striking Force (AASF), allignant au total 348 avions de combat, en grande majorité des Hawker Hurricane, Bristol Blenheim Mk.IF et Fairey Battle Mk.I.

Photos ci-dessous: avions employés par l'AASF en France en mai 1940. 1° Hawker Hurricane Mk.I. 2° Fairey Battle Mk.I.




3° Belgique.

Les Belges allignent dix-huit divisions d'infanterie, deux divisions de chasseurs ardennais et deux divisions de cavalerie. Un effectif de 135,000 hommes.

Ils disposent de 141 avions de chasse, dont 11 Hawker Hurricane et 98 biplans Fairey Fox, démodés et incapables de se mesurer aux chasseurs modernes de la Luftwaffe.

Photo ci-dessous: 1° Hawker Hurricane Mk.I du 350ème Escadron de l'Aéronautique Militaire Belge en mai 1940, sur la base d'Evère/Bruxelles. Ce chasseur robuste était alors équipé de huit mitrailleuses Browning .303. 2° Uniforme de campagne de l'Armée belge en mai 1940.




4° Pays-Bas.

Les Néerlandais disposent de huit divisions d'active, un effectif de 73,000 hommes. Une centaine d'avions, également tous démodés.


5° France.

Le commandement suprême de l'Armée française est assuré par le général Maurice Gamelin. Le Front français du Nord-est est sous les ordres du général Alphonse Georges, qui commande trois Groupes d'armées français et la British Expeditionary Force BEF.

Le Ier Groupe d'Armées du général Gaston Billotte, disposé de la Manche jusqu'à Longuyon, avec trente-quatre divisions françaises et douze divisions britanniques. Respectivement de gauche à droite: la 7ème Armée française (Henri Giraud), le BEF britannique de lord Gort, et les 1ère, 9ème et 2ème Armées françaises, commandées respectivement par Georges Blanchard, André Corap et Charles Huntziger.

A l'est, tout le long de la ligne Maginot jusqu'à Sélestat, est disposé le IIème Groupe d'Armées du général André Prételat, avec les 3ème (Charles Condé), 4ème (Pierre Requin) et 5ème (Victor Bourret) Armées françaises. Trente divisions, dont une britannique (Saar Force) et une polonaise.

Le IIIème Groupe d'Armées du général Antoine Besson, avec la 8ème Armée française du général Marcel Garchery, garde la ligne Maginot de la trouée de Belfort jusqu'à la frontière suisse. L'équivallent de treize divisions.

Le 10 mai 1940, l'Armée française alligne sur le front occidental plus de 4,800 chars, dont 300 B1/B1bis, 250 Somua S35, 945 Renault R35 et 640 Hotchkiss H35/H38/H39, ainsi que plus de 1,500 FT-17 obsolètes datant de la Première Guerre mondiale. C'est un nombre considérable de chars, mais la grande majorité d'entre-eux sont dispersés inutilement par petit nombre sur toute la largeur du front.

Ci-dessous: respectivement chars Renault B1bis, Renault R35, Hotchkiss H39, Somua S35 et Renault FT-17.






Au total, en tenant compte des unités de réserve et de second échelon, les Alliés allignent 137 divisions. 2.9 millions d'hommes. Plus de 5,000 chars, dont 4,800 français. 2,128 avions, dont 1,648 français et 348 britanniques.

Sur les 1,648 avions de l'Armée de l'Air (chasseurs Dewoitine D.520, Morane-Saulnier MS-406 et Potez 630), seuls 599 d'entre-eux (soit 29%) sont opérationnels le 10 mai 1940, dont 170 bombardiers (Bloch MB.210, Breguet 693, Lioré-et-Olivier LeO-45/451).

Photo ci-dessous: quelques-uns des modèles d'avions français les plus connus. 1° Dewoitine D.520. 2° Morane-Saulnier MS-406. 3° Lioré-et-Olivier LeO-451.





Voir aussi:

Battle of France - British Expeditionary Force, Order of Battle (Wikipedia.org)

Battle for France - French Army, Order of Battle (Orbat.com)



Exécution du Plan Jaune: l'offensive allemande à l'Ouest (10 mai - 4 juin 1940).

1° Bataille de la "Forteresse Hollande" (10-14 mai 1940).

Le 10 mai 1940, à 5h35 du matin, des troupes aéroportées de la 7ème Division aérienne de la Luftwaffe, commandée par le général Kurt Student, sont larguées sur les ponts de Rotterdam, Moerdijk, Dordrecht et Nimègue, aux Pays-Bas. Des parachutistes allemands déposés par avions Ju-52 s'emparent également de l'aérodrome de Waalhoven/Rotterdam et neutralisent le fort belge d'Eben-Emael, sur le canal Albert.


Au même moment, les trente divisions du Heeresgruppe B, commandé par le maréchal Fedor von Bock, franchissent la frontière germano-néerlandaise et déferle aux Pays-Bas. L'armée néerlandaise, composée de 8 divisions totalisant 73,000 hommes, ne fait pas le poids et est vite submergée. Dès les premières heures, la Luftwaffe a détruit ou sévèrement endommagé tous les aérodromes, anéantie au sol ou en combat aérien la quasi-totalité de l'aviation néerlandaise (155 avions dont 74 vieux biplans), et s'assure la maîtrise aérienne absolue.

A 22h, des éléments de la 1ère Division légère mécanisée (DLM) (7ème Armée française), après avoir traversé les Flandres, franchissent la frontière dans la région d'Anvers et pénètrent en Hollande.

Le 11 mai 1940, toutes les tentatives de l'armée néerlandaise pour détruire ou reprendre les ponts aux mains des Allemands échouent.

Le 12 mai 1940, le Heeresgruppe B submerge l'armée néerlandaise, ce qui oblige la 7ème armée française, entrée en Belgique deux heures après le déclenchement de l'offensive allemande, et franchit la frontière hollandaise dans la nuit du 10 au 11 mai, à se replier de la région de Breda vers Anvers et d'établir ses positions défensives sur la rive sud de l'estuaire de l'Escaut.

La 6ème Armée allemande du général Walter von Reichenau perce le front hollandais dans la région de Maastricht et pénètre en Belgique, s'empare de Liège, franchit la Meuse et le canal Albert dans la région de Maastricht, ce qui force l'Armée belge à se replier sur la ligne Anvers-Louvain.

Le 14 mai 1940, Rotterdam est victime d'une tragique méprise. Les Allemands remettent un ultimatum au gouvernement néerlandais, lui enjoignant de capituler sous peine de voir anéantir la ville par la Luftwaffe. Les Hollandais acceptent les conditions de leur capitulation, mais ils ne peuvent empêcher la Luftwaffe de décoller à l'heure dite.

L'ordre d'annulation du raid parvient bien à la plupart des escadrilles de bombardement, mais certaines d'entre-elles ne le reçoivent pas et poursuivent leur mission, malgré les efforts des Allemands pour leur faire rebrousser chemin.

Rotterdam est bombardée à 13h30. C'est le centre-ville et les quartiers orientaux qui sont le plus touchés. Le nombre des victimes civiles reste à ce jour indéterminé, approchant sans doute le millier de morts. Plus de 3,000 blessés et 75,000 sans-abris.

Le commandement suprême des forces néerlandaises, le général Henri Gerard Winkelman, acceptent les conditions allemandes et signera l'acte de capitulation sans condition des Pays-Bas le lendemain matin. La reine Willhelmine et son gouvernement se réfugient à Londres.



2° Au centre: front belge et Plan Dyle (10-20 mai 1940).

En Belgique, la Luftwaffe détruit les aérodromes et l'aviation belge au sol. A l'aube, des parachutistes de la 7ème Division aérienne, unité de la Luftwaffe, de Kurt Student atterrissent en planeurs sur les supersttructures du fort d'Eben-Emael, sur le canal Albert, neutralisent ses coupoles d'artillerie et casemates à l'aide de charges creuses.


Une fois les défenses extérieures neutralisées, la 6ème Armée allemande du général Walter Reichenau a beau jeu de franchir en force le Canal Albert sur des canots pneumatiques, et se dirige vers Liège, qu'elle atteint dans la soirée.

L'offensive allemande en Belgique est, pour les stratèges français, conforme à leurs prévisions, car ils ont acquis la certitude qu'Adolf Hitler rééditerait le Plan Schlieffen en attaquant la France à travers la Belgique et la Hollande, comme les Allemands l'ont fait en 1914.

L'état-major de Gamelin réagit presqu'immédiatement et conformément au Plan Dyle, articulées de gauche à droite, la 7ème Armée française (Henri Giraud), la British Expeditionary Force (BEF) de Lord Gort et la 1ère Armée française (Georges Blanchard) franchissent la frontière et pénètrent en Belgique deux heures après le déclenchement de l'offensive allemande, pour prendre position sur la Dyle, entre Louvain et Charleroi, en appuyant leur flanc droit sur Sedan et les Ardennes, réputées infranchissables par les troupes mécanisées ennemies.

Carte ci-dessous: mouvements alliés et allemands 10-16 mai 1940.


C'est une monumentale et funeste erreur de la part des Alliés. Car, à leur surprise, Hitler ne s'en tient pas là. L'attaque de la 6ème Armée allemande le long du canal Albert n'est qu'une diversion dans le but d'attirer les armées françaises et britanniques. Et cela a très bien marché! Selon le Plan Coup de Faucille d'Erich von Manstein, le Führer porte son principal effort à travers les Ardennes belgo-luxembourgeoises vers la Meuse à Sedan, une région qui n'est pas protégée par les efficaces fortifications de la ligne Maginot et que le général Maurice Gamelin n'a pas cru nécessaire de défendre.

Sous le massif forrestier des Ardennes, la progression allemande est confiée au Heeresgruppe A, qui dispose de sept divisions panzers, sur les dix que compte alors la Wehrmacht, le "Groupe de Bataille" (Kampfgruppe) Guderian regroupé en trois Korps motorisés. Respectivement du nord au sud:

  • XV Korps motorisé. Général Hermann Hoth.
    7ème et 5ème Divisions panzers.
    Objectifs: Dinant et Namur.
  • XLI Korps motorisé. Général Georg-Hans Reinhardt.
    6ème et 8ème Divisions panzers.
    Objectif: Monthermé.
  • XIX Korps motorisé. Général Heinz Guderian.
    2ème, 1ère et 10ème Divisions panzers.
    Objectif: Sedan.

Leur but: s'emparer du maximum de ponts tout le long de la Meuse dans leur secteur respectif. La première phase du plan Faucille de Manstein doit se dérouler entre Dinant et Sedan, sur une centaine de kilomètres.

Ce dernier secteur particulièrement sensible n'est défendu que par une centaine de casemates du 147ème Régiment de forteresse et deux divisions de réserve de second ordre, dit de "Catégorie-B": les 55ème et 71ème Divisions d'infanterie du 10ème Corps de la 2ème Armée française, commandée par le général Charles Huntziger.

Le 12 mai 1940, alors que la ligne Sambre-et-Meuse, située au nord, est stabilisée par les Franco-Britanniques et l'Armée belge, la 7ème Division panzer du général Erwin Rommel atteint la Meuse près de Dinant. Il y découvre un pont intact et non défendu, et prend l'initiative de traverser en force. La première tête de pont allemande sur la rive gauche de la Meuse se créée.


3° Front sud: percée et mouvement tournant par Sedan (12-16 mai 1940).

En France, dans la soirée du 12 mai 1940, ce qui devait arriver arriva. Les trois divisions panzers de Guderian débouchent du massif ardennais. Pour les Alliés la surprise est totale. la 1ère Division panzer entre dans Sedan et atteint la Meuse. Au même moment, les 2ème et 10ème Divisions panzers traversent la Semois.

A l'aube du 13 mai 1940, Guderian donne alors à ses divisions blindées ses nouvelles directives: les 2ème et 10ème Divisions panzers doivent avancer, respectivement à l'est et à l'ouest de Sedan. La 1ère Division panzer est chargée de l'assaut principal dans la ville même, dans un secteur où la Meuse forme une boucle en "C".

C'est là qu'interviennent les Dornier Do-17 et les bombardiers en piqué Ju-87 Stuka, qui vont martelées pendant plus de trois heures les deux divisions françaises de classe-B installées en profondeur sur la rive gauche.


A 16h, toutes les pièces d'artillerie et les casemates françaises ayant été mises hors de combat, les premières unités de l'infanterie d'assaut allemande franchissent le fleuve sur des canaux pneumatiques. Elles établissent rapidement une percée vers le sud et s'emparent du bois de Marfée, refoulant au passage la 55ème Division française, qui céde à la panique et qui se désintégre. A l'est de Sedan, la 10ème Division panzer pulvérise la 71ème Division française.

Le 14 mai 1940, le général Charles Huntziger, commandant de la 2ème Armée française, ordonne une contre-attaque effectuée par la 3ème Division Cuirassée de Réserve (DCR) pour éliminer la tête de pont allemande. Il en résultera, entre le 15 et le 18 mai, une furieuse bataille de chars entre la 3ème DCR et la 10ème Division panzer, le village de Stonne changeant plusieurs fois de mains. Martelée par les panzers, l'artillerie antichar et les Ju-87 Stuka, la division cuirassée française perd 80% de ses blindés et les survivants refluent en désordre vers le sud.

Délaissant Paris et la Marne, Guderian effectue un large mouvement tournant au nord-ouest et lance ses 1ère et 2ème Divisions panzer vers la Manche.

Le 15 mai 1940, au sud de Sedan, ses divisions mécanisées dispersent les unes après les autres toutes les contre-attaques des renforts acheminés par la 6ème Armée française. La situation de la 2ème armée française devient intenable. Tout son flanc gauche ayant été anéanti la veille, Huntziger prend la décision de reculer jusqu'à la ligne Maginot, ce qui a pour conséquence d'élargir encore la brèche dans le dispositif français.

C'est le coup de grâce! Le flanc droit de la 9ème Armée française se retrouve à son tour entièrement à découvert. Celle-ci commence à se disloquer dans la journée du 15 mai, après avoir été harcelée par la Lutwaffe, attaquée au sud par Guderian, au nord par von Kleist. La 1ère DCR est littéralement pulvérisée et anéantie.

A Monthermé, les blindés de Reinhardt écrasent le 41ème Corps de forteresse. En Belgique, le commandant de la 9ème Armée, le général André Corap, ordonne alors son replis général sur la frontière française. Cela laisse maintenant à découvert toute le flanc droit de la 1ère Armée française.

Finalement, par effet domino, c'est tout le front français sur la Meuse, entre Dinant et Sedan, qui s'écroule.

En Belgique, ignorante du péril mortel qui la menace, la 1ère Armée française a stabilisé le front allié entre Wavre et Namur. Le 15 mai 1940, dans la région Gembloux-Ernage, sur la ligne KW-Namur, les 2ème et 3ème Divisions légères mécanisées (DLM) du "Corps de cavalerie Prioux" et les 2ème et 7ème Régiments de Tirailleurs Marocains (RTM) résistent depuis deux jours aux assauts des 2ème et 3ème Divisions panzers du XVI Korps motorisé. Cela sera l'un des rares succès défensif français dans cette désastreuse campagne de l'été 1940.

Mais malheureusement, le sacrifice des Tirailleurs marocains se révèlera vain. En effet, débordée par ses flancs nord et sud, la 1ère Armée française reçoit l'ordre d'abandonner ses positions vers une nouvelle ligne de défense moins exposée. Sur les 1,000 Tirailleurs marocains engagés, seule une centaine d'entre-eux s'en sortiront vivant.

En France, cette victoire héroïque, bien qu'inutile, tombera dans l'oubli, elle ne figure même pas dans les manuels ou livres d'histoire sur la Seconde Guerre mondiale. Les Belges, eux, n'ont pas oublié ce sacrifice des Tirailleurs marocains. Entre Dinant et Sedan, les Allemands ont maintenant ouvert une brêche de 80km de large.

En cinq jours, la Wehrmacht a pulvérisé tout le front sud allié et menace d'isolement en Belgique le Corps expéditionnaire britannique et les deux meilleures armées françaises, qui se retrouvent exposées aux attaques du Heeresgruppe B de von Bock en Flandre, et menacées d'encerclement sur leurs arrières par les divisions panzers de von Rundstedt. Les chars de Guderian, au lieu de foncer sur Paris, effectuent un quart de tour à droite vers le nord-ouest et se ruent vers la Manche. Une brèche de 100 km de large est ouverte à l'arrière des armées franco-britanniques et belges en Belgique, et plus rien ne peut désormais arrêter l'avance allemande.


4° Blitzkrieg: l'avance allemande vers la Manche (15-20 mai 1940).

Négligeant Paris, les divisions blindées allemandes bifurquent vers le nord-ouest et se dirigent vers les côtes de la Manche, enfermant les 7ème, 1ère et 9ème Armées françaises, le Corps expéditionnaire britannique et l'Armée belge dans une immense poche, en Flandre et en Hollande.

Cependant, la rapidité avec laquelle les chars allemands avancent les place eux-mêmes dans une position vulnérable, l'infanterie de soutien et le ravitaillement n'arrivant pas à suivre leur rythme de progression. Il en résulte que les chars de Guderian et de Rommel consomment énormément de carburant et que les lignes de communication sont étendues au maximum. Il doivent donc ralentir.

A paris, le Haut-Commandement du général Maurice Gamelin cède à la panique. Dans la matinée du 15 mai 1940, lorsque Winston Churchill, le nouveau Premier ministre britannique depuis moins d'une semaine, téléphone à son homologue français Paul Reynaud, celui lui répond: "Nous sommes défaits. Nous avons été battus et la bataille est perdue!"

Churchill décide de se rendre à Paris, et débarque au GQG français le 16 mai 1940. Il réalise la gravité de la situation en observant les membres du gouvernement en train de brûler les archives et se préparer à évacuer la capitale. Au cours d'une réunion au climat assez sombre avec l'état-major français, le Britannique demande à Gamelin: "La marge de manoeuvre?". Le Français, pessimiste, lui répond: "Aucune!"

Churchill écrira plus tard, dans ses Mémoires d'après-guerre, qu'il n'avait encore jamais éprouvé un tel choc. Il demande à Gamelin quand et où a-t'il l'intention de contre-attaquer sur les flancs du saillant allemand. Gamelin lui répond simplement: "inférieur en effectif, inférieur en équipement, inférieur en manoeuvre."

Ci-dessous: la situation du front entre les 16 et 21 mai 1940.


Le 17 mai 1940, à midi, les avant-garde blindées de Guderian atteignent l'Oise, au sud de Guise, près de Saint-Quentin. La nouvelle 4ème Division cuirassée de Réserve (DCR) a été constituée par le colonel Charles de Gaulle, à partir d'unités des autres théatres d'opération amenées en renfort, à Bruyères, dans la région de Laon.

Dans la nuit du 16 au 17 mai 1940, à 4h15 du matin, bien qu'elle ne possède encore qu'une partie de ses unités et qu'elle soit toujours en cours de formation, la 4ème DCR de de Gaulle lance une contre-attaque vers Montcornet, dans la région de Laon, sur les arrières de la 10ème Division panzer. Après avoir marqué quelques petits succès initiaux contre des positions d'artillerie antichars, les blindés de de Gaulle prennent Montcornet, mais l'infanterie d'accompagnement, chargée de l'occupation de la localité, n'a pas suivi.


Martelée par l'intervention des bombardiers en piquée Ju-87, stoppée par le raidissement de la résistance allemande, la 4ème DCR doit finalement regagner ses positions de départ.

Cette contre-attaque, bien qu'ayant finalement échoué, inspirera une seconde et future attaque similaire de de Gaulle, cette fois dans la région d'Abbeville, le 28 mai. L'attaque de la 4ème DCR vers Montcornet lui vaudra, le 25 mai 1941, d'être promu au grade de général de brigade.


Le 18 mai 1940, Le XIX Korps motorisé du général Heinz Guderian occupe Saint-Quentin et Peronne, sur la Somme, et poursuit son avance vers la côte de la Manche. Dans le secteur de la 1ère Armée française, la 7ème Division panzer d'Erwin Rommel atteint Cambrai. La ville tombe aux mains du XV Korps motorisée du général Hermann Hoth dans la soirée, après que ses défenseurs l'aient abandonné.

Les restes de la 9ème Armée du général André Corap entrent dans la petite localité du Cateau, dans la région de Cambrai. Corap et son état-major, isolés de leur troupes, sont faits prisonniers par les Allemands. Il est remplacé par le général Henri Giraud. Sur l'Oise, le commandement de la 7ème Armée française est confié au général Aubert Frère.

En Belgique, la 18ème Armée allemande du général Georg von Küchler fait son entrée dans Anvers. Mons tombe aux mains de la 6ème Armée allemande du général Walter von Reichenau.

Le 19 mai 1940, les sept divisions panzers qui ont percé le front français entre Namur et Sedan se réorganisent dans la région entre Cambrai et Péronne. Erwin Rommel réussit à convaincre son supérieur direct, le général Hermann Hoth, commandant du XV Korps motorisé, de laisser à sa 7ème Division panzer l'occasion d'occuper les hauteurs stratégiquement importantes qui dominent Arras, défendu par le Corps Expéditionnaire britannique (BEF) de Lord Gort.

Vingt-quatre heures après André Corap, c'est au tour du général Henri Giraud, qui vient juste de lui succéder à la tête de la 9ème Armée française, et de tout son état-major, d'être fait prisonniers par les Allemands. Les débris de la 9ème Armée française sont intégrés dans la 7ème Armée française du général Aubert Frère.

Le 20 mai 1940, le XIX Korps motorisé de Guderian occupe Amiens et progresse vers Abbeville, sur la Somme. La 7ème Division panzer du général Erwin Rommel atteint son objectif: les hauteurs stratégiques autour d'Arras. Le XIX Korps poursuit sa progression vers la mer. La 1ère Division panzer du général Friedrich Kirchner occupe Amiens. A 19h, la 2ème Division panzer occupe Abbeville. A 20h, l'un de ses escadrons atteint la côte de la Manche à Noyelles-sur-Mer, à environ 13km au nord-ouest d'Abbeville.

Dans la nuit du 20 au 21 mai 1940, sur la rive droite de la Somme, d'Abbeville à la côte, les Allemands créent ainsi dans les lignes alliées un couloir d'une trentaine de kilomètres de large.

Ils isolent quarante-cinq divisions alliées et plus d'un demi-million d'hommes dans une énorme poche, appellée la "Nasse belge". 287,000 soldats britanniques de Lord Gort, 172,000 Français de la 1ère Armée et des restes des 7ème et 9ème Armées, ainsi que l'Armée belge.

Adolf Hitler exulte et déclare que l'armistice sera signé à Rethondes, en forêt de Compiègne, à l'endroit même où fut signé la capitulation allemande le 11 novembre 1918, et que la France devra restituer "tous les territoires dont elle s'est emparée dans cette région depuis quatre-cent ans".


5° Plan Weygand et bataille de la Lys et de l'Yser (20-28 mai 1940).

Le 19 mai 1940, à Paris, le maréchal Philippe Pétain est nommé vice-président du Conseil. Paul Reynaud, le président du Conseil, désemparé par l'ampleur de la débâcle, limoge le commandant en chef de l'Armée française, Maurice Gamelin, et le remplace par le général Maxime Weygand, âgé de 73 ans et rappelé d'urgence du Levant.

Les sept divisions panzers qui ont percé le front français entre Namur et Sedan se réorganisent dans la région entre Cambrai et Péronne. Le général Erwin Rommel réussit à convaincre son supérieur direct, le général Hermann Hoth, commandant du XV Korps motorisé, de laisser à sa 7ème Division panzer l'occasion d'occuper les hauteurs stratégiquement importantes qui dominent Arras, défendu par le Corps Expéditionnaire britannique (BEF) de Lord Gort.

Vingt-quatre heures après la capture d'André Corap, c'est au tour du général Henri Giraud, qui vient juste de lui succéder à la tête de la 9ème Armée française, et de tout son état-major, d'être fait prisonniers par les Allemands. Les débris de la 9ème Armée française sont intégrés dans la 7ème Armée française du général Aubert Frère.

Le 21 mai 1940, à partir d'Arras, sur la Scarpe, des unités de la British Expeditionary Force (BEF), regroupés au sein de la "Frankforce", lancent vainement une attaque vers Bapaume, dans l'espoir de briser leur encerclement dans les Flandres. Les pièces PaK de 37mm de la Wehrmacht se révèlent incapable de percer le blindage des chars Matilda II, mais après un bon départ, ils sont stoppés par les 88mm antiaériens reconvertis et refoulés, puis forcés de regagner leurs positions de départ.

Dans la région au sud-est de Lille, la 1ère Armée française du général George Blanchard tente également une manoeuvre de dégagement en direction de Cambrai, sans plus de succès que les Britanniques.

Dans la région d'Abbeville, les sept divisions panzers du général Ewald von Kleist élargissent le couloir allemand créé la veille.

En Belgique, la 9ème Armée française est maintenant virtuellement détruite. Au nord de la poche alliée, sur le canal Gand-Terneuzen et l'Escaut, entre Audenarde et Terneuzen, ce qui reste de l'Armée belge organise une ligne de défense.

Carte ci-dessous: situation du 21 mai au 4 juin 1940.


Le 22 mai 1940, Weygand ordonne aux troupes alliées isolées en Belgique et dans le nord du Pas de Calais d'attaquer vers le sud pour rejoindre les unités attaquant vers le nord depuis la Somme, et briser leur encerclement. Il fait monter vers le front de la Somme toutes les unités disponibles en France pour exécuter son plan.

Dans le chateau de Vincennes, le nouveau commandant en chef des forces armées françaises expose au président du Conseil Paul Reynaud et au Premier ministre britannique Winston Churchill son plan destiné à briser l'anéantissement des forces franco-britanniques prises au piège en Flandre. Les Britanniques du BEF et les restes de la 1ère Armée française doivent se replier des positions de l'Escaut sur la côte, à la frontière franco-belge.

D'après ce plan, les restes de l'Armée belge se replieraient sur l'Yser, tandis que les Franco-Britanniques attaqueraient en force en direction du sud-ouest, pour percer le couloir allemand et briser leur isolement.

Simultanément, les troupes de la 10ème Armée française du général Robert Altmayer, au sud du couloir, franchiraient la Somme, puis, par une attaque vers le nord, feraient leur jonction avec les forces alliées encerclées. Weygand pense que cette triple manoeuvre devrait permettre de briser le couloir formé par les divisions blindées allemandes et sauver ce qui peut l'être.

A Paris et à Londres, le "Plan Weygand" obtient l'agrément des hommes politiques français et britannique. Malheureusement, malgré l'arrêt imprévu de la progression allemande entre le 23 et le 25 mai, aucune des manoeuvres prévues ne pourra se réaliser. En tout premier lieu, les Belges ne sont absolument pas disposés à se replier plus à l'ouest de la Lys.

En second lieu, bien loin de pouvoir attaquer à partir d'Arras en direction du sud, les divisions britanniques de Gort éviteront de justesse l'encerclement en évacuant la ville dans la nuit du 23 au 24 mai.

L'attaque franco-britannique à partir du nord sera donc reporté au 26 mai. Mais, dans la nuit du 25 au 26 mai, Gort doit détourner sur Ypres plusieurs de ses divisions destinées à l'offensive afin de colmater une brêche dans le dispositif allié, à l'endroit précis où les lignes de défense britanniques et belges doivent se souder.

Enfin, et c'est le plus grave, sur le terrain il n'y a plus aucune coordination entre troupes françaises, belges et britanniques.

Le 23 mai 1940, dans la zone d'opération du XIX Korps motorisé du général Heinz Guderian, Boulogne tombe aux mains de la 2ème Division panzer. Calais est encerclée par la 1ère Division panzer. La garnison française capitulera le 27 mai.

Dans la zone d'opération du XV Korps motorisé du général Hermann Hoth, la 7ème Division panzer d'Erwin Rommel s'empare d'Arras, abandonnée par les Britanniques.

L'offensive de la 10ème Armée française du général Robert Altmayer sur la Somme, entre Peronne et Amiens, désormais sans espoir, est arrêtée.

En Belgique, la 6ème Armée allemande du général Walter von Reichenau perce le front de l'Armée belge, franchit l'Escaut et s'empare de Courtrai. Au nord, la 18ème Armée allemande du général Georg von Küchler perce le front belge sur le canal Gand-Terneuzen, qu'elle franchit en force.

En Allemagne, Adolf Hitler et le maréchal Gerd von Rundstedt, commandant du Heeresgruppe (Groupe d'armées) A, sans doute par crainte de voir se développer des attaques sur leurs arrières et leurs lignes de communication étirées au maximum, et contre l'avis des généraux Erich von Manstein et Heinz Guderian, ordonnent aux divisions panzers d'Ewald von Kleist de ralentir leur progression.

En une semaine, certaines de ces unités panzers ont parcouru plus de 400 km, sans se préoccuper de ce qu'elles laissaient à droite ou à gauche, ou de l'accompagnement de l'infanterie, qui éprouve de la peine à suivre le rythme.

C'est cette hésitation qui va permettre le réembarquement du corps expéditionnaire britannique et le sauver de l'anéantissement total. Une hésitation qui privera Hitler d'une victoire totale en Europe.

Le 24 mai 1940, le XIX Korps donne l'assaut à Calais, encerclée. En Flandre, après avoir culbuté la veille l'Armée belge, la 6ème Armée allemande du général Walter von Reicheneau franchit en force l'Escaut, et se dirige vers la Lys et l'Yser.

Le 25 mai 1940, les Franco-Britanniques encerclés dans les Flandres entament leur repli général vers la région côtière Dunkerque-Malo les Bains-Zuidcoote-Bray Dunes et y établir un périmètre défensif. Les restes de l'Armée belge s'effrondrent entre Geluwe et la Lys.

Le 26 mai 1940, après l'effondrement de l'Armée belge, Leopold III informe ses alliés franco-britanniques que sa situation est devenue critique et que sa fin est proche. De son côté, le gouvernement belge prie le Roi de quitter son pays, comme l'ont déjà fait la reine des Pays-Bas et la Grande-Duchesse de Luxembourg. Léopold III refuse.

En France, dans la zone d'opération du XIX Korps motorisé, après les assauts allemands répétés des deux derniers jours, la garnison française de Calais capitule.

En Grande-Bretagne, le commandant de la Home Fleet, l'amiral Bertram Ramsey, donne son autorisation pour l'exécution de l'opération Dynamo, le réembarquement des 350,000 Franco-Britanniques enfermés dans la poche des Flandres, dans le secteur Dunkerque-Malo les Bains-Zuidcoote-Bray Dunes.


6° Opération Dynamo: le miracle de Dunkerque (27 mai - 4 juin 1940).

Le 27 mai 1940 débute l'opération Dynamo. Dans la poche de Dunkerque, 198,000 soldats britanniques et 140,000 Français commencent leur réembarquement sur la côte. Les bombardiers de la Luftwaffe bombarde la ville et le port de Dunkerque sans interruption durant toute la journée. Intervention massive de la Royal Air Force en soutien du réembarquement. Dans la soirée, environ 7,669 soldats britanniques et français ont réussi à réembarquer et à regagner l'Angleterre.

Photo: cannonier d'une pièce AA de la Royal Navy couvrant le réembarquement des soldats alliés.


Dans le village de Lestrem, à 10km au nord de Bethune, des hommes de la 4ème Compagnie, 1er Bataillon, 3ème Régiment panzer-SS de la 3ème Division panzer-SS Totenkopf, engagés en France depuis le 16 mai et commandés par le Hauptsturmfuhrer Fritz Knochlein, massacrent 97 prisonniers de guerre britanniques appartenant au 2ème Bataillon du Royal Norfolk Regiment.

En Belgique, dans la soirée, après en avoir informé les gouvernements français et britannique, le Roi Léopold III envoie un parlementaire au QG allemand pour discuter les termes de sa capitulation. A 22h, les Allemands font savoir à l'envoyé du roi de Belgique que le Führer exige une capitulation inconditionnelle des Belges.

Le 28 mai 1940, à 0h30, Léopold III de Belgique signe la capitulation inconditionnelle de son armée. Le gouvernement belge en exil à Limoges le désapprouve. Le cessez-le-feu doit entrer en vigueur à 4h30 heure de Bruxelles (3h30 GMT). Contrairement à la future capitulation française, le roi des Belges ne s'en tient qu'à la reddition militaire et refuse l'armistice.

Etant commandant suprême de l'Armée belge, il refuse de partir en exil avec son gouvernement, préférant partager le sort de ses troupes. Cela lui vaudra d'être interné par les Allemands. Cette décision, lourde de conséquences sur la politique du pays, sera à l'origine des controverses sur la "Question Royale", qui divisera les Belges de 1945 à 1950.

A Dunkerque, l'opération Dynamo bat son plein. Au crépuscule de ce second jour, 17,804 Britanniques et Français ont réembarqué pour l'Angleterre. La situation des Alliés est catastrophique. La ville et les quais de Dunkerque sont pilonnées jour et nuit par la Luftwaffe, malgré la présence constante de la Royal Air Force.

Les navires britanniques qui réussissent à quitter le port de Dunkerque doivent alors éviter le feu des batteries côtières allemandes installées à Calais, et le harcèlement des U-Boote qui viennent de la mer du Nord.

Photo ci-dessous: soldats français évacués de Dunkerque, débarqués en Angleterre.


Le 29 mai 1940, les Allemands s'emparent de Lille, d'Ypres et d'Ostende. Dans la poche de Dunkerque, sous les attaques continuelles de la Luftwaffe, plus ou moins bien contenue par la Royal Air Force, l'évacuation de Dunkerque se poursuit. Ce troisième jour, 47,310 soldats britanniques et français réembarquent et traversent la Manche pour l'Angleterre.

Le 30 mai 1940, dans la poche de Dunkerque, l'artillerie de campagne britannique tire ses derniers obus pour tenir en respect les troupes allemandes qui avancent. La Luftwaffe coule trois destroyers et en endommagent six autres. Elle envoie également par le fond de nombreux bâteaux de pêche et un certain nombre de cargos employés avec les navires de guerre pour ramener les soldats en Angleterre.

Ce quatrième jour de l'opération Dynamo, 53,823 soldats britanniques et français regagnent l'Angleterre.

Le 31 mai 1940, à Dunkerque, Malo-les-Bains, Zuydcoote et Bray Dunes, 68,014 soldats britanniques et français réussissent à réembarquer. Par ailleurs, l'Amirauté britannique décide de retirer de l'opération Dynamo tous les destroyers modernes, car elle ne peut plus se permettre de perdre d'autres navires de ce type.

Lord Gort, commandant la British Expeditionnary Force, et le lieutenant-général Alan Francis Brooke, commandant du II Corps britannique, embarquent pour Douvres. Les troupes anglaises encore en France passent sous commandement du major-général Harold Alexander.

Le 1er juin 1940, l'artillerie et l'aviation allemandes soumettent le littoral de Dunkerque à un barrage d'artillerie intensif et ininterrompu jour et nuit. La Luftwaffe lance également son attaque la plus violente contre les navires alliés depuis le début de l'opération Dynamo.

En quelques heures, quatre destroyers, dont le français Le Foudroyant, deux ferry-boats, un dragueur de mines et une canonière sont coulés. La ligne de défense britannique est enfoncée à Bergues, à 7km de Dunkerque. Les arrière-gardes britanniques doivent se replier sur la côte.

A la suite de la reprise de l'offensive terrestre allemande contre la poche de Dunkerque, l'Amirauté britannique décide de suspendre momentanément les opérations de réembarquement de jour pour l'Angleterre. Néammoins, ce 1er juin, avant que cet ordre ne soit appliqué, 64,429 soldats franco-britanniques réussissent à traverser La Manche.

Dans la nuit du 1er au 2 juin 1940, 26,256 Franco-Britanniques sont évacués vers l'Angleterre. Dans la nuit du 2 au 3 juin 1940, 26,746 Franco-Britanniques.

Le 3 juin 1940, Les Allemands lancent leur ultime attaque contre le périmètre défensif de Dunkerque. Les arrière-gardes françaises doivent se replier sur une nouvelle ligne située à moins de 3km de l'extrémité de la jetée orientale du port de Dunkerque.

Dans la nuit suivante, La Royal Navy embarque pour la dernière fois 26,175 soldats franco-britanniques pour l'Angleterre.

Le 4 juin 1940, à 3h40 du matin, le destroyer Shikari lève l'ancre. C'est le dernier navire britannique qui quitte Dunkerque, avec à son bord environ un millier de soldats français, mais malheureusement, il reste encore sur le littoral plusieurs milliers de soldats alliés. A l'aube, les Allemands mettent le pied sur la plage de Dunkerque.

Depuis le 27 mai, 338,226 soldats alliés (198,229 Britanniques et 139,997 Français) ont réussi à quitter le littoral franco-belge, sauvés par une flotte hétéroclite de 850 navires, dont 700 navires marchands, simples bâteaux de pêches, navires de plaisance, yachts privés, et même des bâteaux pompes des services anti-incendie de la Tamise. L'opération Dynamo a été dirigée par le commandant du département maritime de Douvres, l'amiral britannique Bertram H. Ramsey, qui a réquisitionné toutes les embarcations disponibles, militaires ou civils.

Plus tard, environ 100,000 soldats français seront rapatriés en Bretagne et dans la Cotentin pour participer à la "Bataille de France".

Au cours de ce sauvetage grandiose et désespéré, les Alliés ont perdu environ 220 navires et embarcations de toutes sortes, dont six destroyers britanniques et trois destroyers français. 19 autres destroyers alliés ont été endommagé à des degrés divers. Les pertes humaines de la Royal Navy et de la Marine française s'élèvent à 22,698 tués. 177 avions de la Royal Air Force, dont 40% de bombardiers, ont été perdu du 27 mai au 4 juin, contre 240 avions de la Luftwaffe.

Appliquant le principe militaire selon lequel le personnel doit être sauvé avant le matériel, la BEF a abandonné sur les plages françaises la totalité de son matériel.

Les Allemands s'emparent ainsi d'un fabuleux trésor de guerre: 2,472 pièces d'artillerie, 65,000 véhicules motorisés, 130,000 mitrailleuses, 416,000 tonnes de vivres, 76,000 tonnes de munitions et 162,000 tonnes de carburant. La Grande-Bretagne se retrouve ainsi pratiquement désarmée. Après cette évacutation de Dunkerque, il ne lui reste plus, sur le sol métropolitain, que 500 pièces d'artillerie disponibles, en comptant celles que l'on retire des musées.

A Londres, parlant à la Chambre des Communes, le Premier ministre Winston Churchill déclare que si l'Angleterre venait à être occupée par les Allemands, elle continuerait la guerre à partir des territoires de l'Empire britannique.



Voir aussi:

Evacuation of Dunkirk



Plan Rouge (5-25 juin 1940): la "Bataille de France".

Adolf Hitler informe ses subordonnés réunis à Cambrai, qu'il a décidé de "rassembler immédiatement les forces blindées et les préparer à une action décisive vers le sud, Paris et la Loire, afin de "régler définitivement ses comptes avec l'Armée française". C'est le "Plan Rouge" (Fall Rot).

Von Bock déplace sur la Somme ses 4ème, 6ème et 18ème Armées allemandes, pour leur faire prendre position au côté des 2ème, 9ème, 12ème et 16ème Armées de von Rundstedt, déjà positionnées sur l'Aisne et la Meuse.

Dix divisions panzers sont réorganisées en cinq Korps motorisés. Trois d'entre-eux sont affectés au Heeresgruppe B du maréchal Fedor von Bock, les deux derniers au Heeresgruppe A du maréchal Gerd von Rundstedt.

Heeresgruppe B. Maréchal Fedor von Bock.

  • 4ème Armée allemande. Général Günther von Kluge.
    Avec les XIV et XV Korps motorisés.
  • 6ème Armée allemande. Général Walter von Reichenau.
    Avec le XVI Korps motorisé.
  • 18ème Armée allemande. Général Georg von Küchler.

Heeresgruppe A. Maréchal Gerd von Rundstedt.

  • Armeegruppe Guderian. Général Heinz Guderian.
    [Rattaché à la 12ème Armée allemande. Général Wilhelm List]
    Avec les XXXIX et XLI Korps motorisés.

Composition des cinq Korps motorisés:

  • XIV Korps motorisé (Ewald von Kleist) [Somme]:
    9ème et 10ème Divisions panzers.
    13ème Division d'infanterie motorisée.
    Régiment d'infanterie "Grossdeutschland".
  • XV Korps motorisé (Hermann Hoth) [Somme]:
    5ème et 7ème Divisions panzers.
    2ème Division d'infanterie motorisée.
  • XVI Korps motorisé (Erich Hoepner) [Somme]:
    3ème et 4ème Divisions panzers.
    Division SS-VT "Verfugungstruppe" [Future 2ème Division panzer-SS Das Reich].
    4ème et 33ème Divisions d'infanterie.
  • XXXIX Korps motorisé (Rudolf Schmidt) [Aisne]:
    1ère et 2ème Divisions panzers.
    29ème Division d'infanterie motorisée.
  • XLI Korps motorisé (Georg-Hans Reinhardt) [Aisne]:
    6ème et 8ème Divisions panzers.
    20ème Division d'infanterie motorisée.

De son côté, le général Maxime Weygand, commandant en chef des armées françaises, a l'intention de contre-attaquer précisément à partir du sud du couloir dans lequel s'étaient engouffrés les divisions panzers de Gerd von Rundstedt, région où se trouve concentré le gros des forces françaises.

Il oppose donc à la Wehrmacht les grandes formations suivantes:

Sur la gauche du dispositif, le IIIème Groupe d'armées du général Antoine Besson, disposé sur la Somme, entre son embouchure et Noven, avec les 10ème et 7ème Armées françaises, respectivement commandées par les généraux Robert Altmeyer et Aubert Frère.

Au centre, le IVème Groupe d'armées du général Charles Huntziger, disposé sur l'Aisne et la Meuse, entre Soissons et Verdun, avec les 6ème, 4ème et 2ème Armées françaises, respectivement commandées par les généraux René Olry, Edouard Requin et Henry Fredenberg.

Et sur sa droite, le IIème Groupe d'armées du général André Prétélat, disposé sur la ligne Maginot et le Rhin, entre Montmédy et Bâle, sur la frontière suisse, avec 3ème, 5ème et 8ème Armées françaises, respectivment commandées par les généraux Charles Condé, Victor Bourret et Emile Laure.

Le 5 juin 1940, à 2h du matin, la Bataille de France, ou le "Plan Rouge" (Fall Rot), débute par une violente préparation d'artillerie terrestre et aérienne allemande sur la Ligne Weygand, établie sur la Somme, l'Aisne et la Meuse.

L'offensive terrestre allemande débute à l'aube. Y participent, d'Abbeville à Verdun, les 4ème, 18ème, 6ème, 9ème, 2ème, 12ème et 16ème Armées allemandes, avec 60 divisions, dont 10 de panzers.

De son côté, le général Maxime Weygand adresse à ses troupes un appel affligé: "Puisse la pensée des souffrances de notre pays insuffler en vous la ferme résolution de résister. Le destin de la nation et l'avenir de vos enfants dépendent de votre détermination." Cet "ordre Weygand" est donné à toutes les unités de défendre leurs positions "sans esprit de recul".

Weygand, dès sa prise de commandement, le 19 mai 1940, avait tenté d'arrêter, sans succès, la course à la mer de la Wehrmacht, par des contre-attaques (21-31 mai) en direction d'Arras et d'Amiens. Celles-ci ayant échoué, il organise une nouvelle ligne de défense sur la Somme et l'Aisne. Des renforts et des éléments provenant des autres théâtres d'opération (Alpes, Sud-Est, ...) sont regroupés dans un nouveau IVème Groupe d'Armées, commandé par le général Charles Huntziger.

Huntziger, avec l'appui des IIème et IIIème Groupes réorganisés, ses ses flancs droit et gauche, tient un front large de plus de 300 km. Sur ces trois cents kilomètres de front, entre Abbeville et Verdun, 64 divisions françaises, exsangues et au bout du rouleau, font face aux 60 divisions allemandes, recompletées.

Dans le ciel, 1,000 avions français contre 3,200 avions allemands.

En face d'Amiens et de Reims, les Allemands ont disposés dix divisions panzers en quatre formations de choc: XIV (Gustav von Wietersheim), XV (Hermann Hoth), XVI (Erich Hoepner), XIX (Heinz Guderian) Korps motorisés, avec un effectifs total d'environ 3,000 blindés.

Carte ci-dessous: situation du Plan Rouge du 4 au 12 juin 1940.


60 divisions de la Wehrmacht déclenchent le "Plan Rouge" et donnent l'assaut aux unités françaises sur la Somme, l'Aisne et la Meuse, entre le 5 et le 9 juin.

Les Français se défendent vaillament mais, dans la nuit du 8 au 9 juin, le Heeresgruppe B du maréchal Fedor von Bock perce le front français et s'engouffre dans la trouée vers Paris.

Le lendemain, 9 juin 1940, le Heeresgruppe A commandé par le maréchal Gerd von Rundstedt s'empare de Reims.

Le 10 juin 1940, le gouvernement de Paul Reynaud, pris de panique, abandonne la capitale pour Tours. Paris est déclaré "ville ouverte".

Pendant trois jours, la résistance française est acharnée, mais le 11 juin, la retraite des Français qui font face à von Bock contraint ceux qui luttent contre von Rundstedt, le IVème Groupe d'Armées d'Huntziger, à se replier sur la Marne. Von Rundstedt en profite pour s'engouffrer dans le vide ainsi créé.

Et le 12 juin 1940, Guderian déborde Paris par l'est. Les panzers de Hoth menacent la capitale française par l'ouest et atteignent la Seine.

Les Allemands entrent dans Paris le 14 juin 1940, déserté par le gouvernement et l'armée, sans tirer le moindre coup de feu, et la Wehrmacht défile triomphalement sur les Champs Elysées.


Trois jours plus tôt, le 11 juin 1940, le Premier ministre Winston Churchill s'est rendu à Tours pour rencontrer Reynaud et le presser de poursuivre la résistance. Churchill retourne à Londres avec le général Charles de Gaulle, que Reynaud a nommé Sous-secrétaire d'Etat à la Guerre le 5 juin.

Le 14 juin 1940, les Heeresgruppen A et B ont déjà traversé la Seine en force et progressent vers la Loire. Le Heeresgruppe C du maréchal Wilhelm von Leeb, inactif jusqu'à présent, passe à l'offensive, perce la ligne Maginot dans la région de Sarrebourg-Bitche, et déferle en Alsace vers Strasbourg, Nancy et Luneville.

Carte ci-dessous: situation du Plan Rouge du 13 au 25 juin 1940.


Ce même jour, débute l'opération Ariel, l'évacuation de 215,000 soldats alliés par la Royal Navy à partir des ports de Cherbourg, Saint-Malo, Saint-Nazaire, Brest et Nantes. Elle se poursuivra jusqu'au 25 juin. C'est en quelque sorte une répétition de l'opération Dynamo et un deuxième "miracle de Dunkerque".

Photo ci-dessous: l'opération Ariel (14-25 juin 1940), l'évacuation de 215,000 soldats français, polonais et britanniques par la Royal Navy, fait figure de "second miracle de Dunkerque". 1° Colonne de soldats britannique à partir de Brest, 15 juin 1940. 2° Navires d'évacuation de la Royal Navy vers l'Angleterre, 15 juin 1940.




Le 15 juin 1940, à l'est, la 7ème Armée allemande du général Friedrich Dollmann perce la Ligne Maginot, traverse le Rhin et s'empare de Colmar. Le Heeresgruppe C et la 16ème Armée allemande du Heeresgruppe A encerclent ce qui reste du IIème Groupe d'armées français dans une poche à l'est d'Epinal. La poche française d'Epinal déposera les armes le 22 juin.

Le 16 juin 1940, Winston Churchill propose au gouvernement de Paul Reynaud l'idée audacieuse du Français Jean Monet: la fusion de la France et du Royaume-Uni en un seul Etat, avec un seul gouvernement et une seule armée, pour combattre le Troisième Reich jusqu'au bout.

Mais la situation militaire sur le front se dégradant rapidement, certains membres du Conseil des ministres réfugiés à Bordeaux paraissent d'avis de demander les conditions d'armistice aux Allemands.

Le 16 juin 1940 à 17h, devant le refus du gouvernement français de fusionner avec la Grande-Bretagne, Paul Reynaud annonce sa démission. Dans la soirée, le Président de la République Albert Lebrun nomme le maréchal Philippe Pétain, vice-président du Conseil, tout auréolé de ses victoires passées, comme successeur de Reynaud.

Quelle n'est pas la surprise de Lebrun en voyant Pétain sortir une liste de son futur gouvernement déjà toute prête! Le nouveau cabinet Pétain se rallie à la proposition de Camille Chautemps, qui veut demander immédiatement les conditions de l'armistice de l'Allemagne, par l'intermédiaire de l'Espagne.

Le soir, alors que de Gaulle a quitté Londres pour Bordeaux, et ignore tout de la nouvelle situation, Pétain télégraphie la nouvelle à Winston Churchill. La réponse du Premier ministre est la suivante: "A condition que la flotte française rejoigne immédiatement les ports britanniques pendant les négociations, le gouvernement de Sa Majesté donne son plein consentement au gouvernement français pour qu'il engage des pourparlers d'armistice avec les Allemands."

Lorsque de Gaulle atterit à Bordeaux, il est furieux et ulcéré par la décision du gouvernement français de capituler.

A 23h, Pétain charge son ministre des Affaires étrangères, Paul Baudoin, de contacter les Allemands et les Italiens pour entamerles négociations en vue de sa capitulation.

Dans la nuit du 16 au 17 juin 1940, aux environs de minuit, par le canal de l'ambassadeur d'Espagne à Paris, le gouvernement français présente officiellement sa demande d'armistice aux gouvernements allemand et italien.

Le matin du 17 juin 1940, de Gaulle reprend l'avion pour Londres. A midi, le maréchal Pétain, le nouveau président du Conseil français,s'adresse par radio à la nation pour lui annoncer que des pourparlers d'armistice sont en cours avec les Allemands.

En Grande-Bretagne, Winston Churchill s'adresse sur la radio de la BBC au peuple britannique pour lui faire part de la démarche d'armistice des Français. Il affirme que "la bataille de France" est terminé, et que "la bataille d'Angleterre" va bientôt commencer. Mais que les Allemands ne sont pas encore prêts.

Pourtant, sur la Loire, des unités françaises continuent de se battre. Notamment à Saumur, le 19 juin, où les Cadets de l'école de cavalerie défendent avec héroisme les ponts sur la Loire.

Le 18 juin 1940, à 18h, à Londres, le général Charles de Gaulle lance sur les ondes de la BBC son célèbre "Appel du 18 juin".

Le 19 juin 1940, dans les ports de Bayonne et de Saint-Jean de Luz, la Royal Navy évacue en Angleterre 190,000 soldats alliés, dont le contingent polonais.

Le 21 juin 1940, la délégation française d'armistice est reçue à Rethondes, dans la foret de Compiègne, dans le Wagon "Foch" à l'endroit exact où l'Allemagne avait capitulé le 11 novembre 1918. Le lendemain, après de laborieuses tractations, le général Charles Huntziger signe, en présence d'Hitler, l'Armistice et la capitulation de la France, qui devront entrer en vigueur le 25 juin.

Ce même jour, Benito Mussolini, qui a déclaré la guerre à la France et à la Grande-Bretagne le 10 juin, profitant de la victoire allemande, lance son offensive générale dans les Alpes et annexera bientôt tout le sud-est de la France.

Le 25 juin 1940, les opérations militaires cessent partout en France, exceptées quelques poches de résistance qui lutteront ici et là jusqu'au début du mois de juillet. La zone d'occupation allemande fixée par la convention d'armistice était plus petite que le territoire que la Wehrmacht avait conquis.

Trois jours plus tôt, la Wehrmacht s'était avancée jusqu'en Isère, à Lyon, Saint-Etienne, Clermont-Ferrand et Vichy. Elle se voit contrainte d'évacuer ces villes et de reculer.

Par contre, elle gagne les côtes atlantiques qu'elle n'occupait pas le 22 juin, à savoir de l'Estuaire de la Gironde jusqu'à la frontière espagnole. Ce sera le tracé de la futur ligne de démarcation, jusqu'à l'invasion allemande de la "Zone Libre", le 11 novembre 1942.


Bilan et conséquences de la Bataille de France (10 mai - 25 juin 1940).

Au cours de cette campagne de six semaines, la Wehrmacht a perdu (3) 27,074 tués, 110,034 blessés et 18,384 disparus, ainsi que 753 chars. La Luftwaffe, de son côté, enregistre la perte de 1,428 avions détruits et 488 autres endommagés, soit 36% des effectifs aériens engagés dans la bataille.

Selon le Service Historique de la Défense, l'Armée française a enregistré au cours de cette même période la perte de 85,310 tués, dont 5,400 Maghrébins, 12,000 disparus et plus de 1.5 million de prisonniers de guerre, qui prennent bientôt le chemin de l'Allemagne. En mai 1945, les Alliés rapatrieront 940,000 d'entre-eux. Entretemps, 24,600 prisonniers seront morts en captivité, 71,000 se seront évadés, et 220,000 relâchés en vertu des accords signés entre le Troisième Reich et le gouvernement de Vichy. La plupart des prisonniers français serviront comme "force de travail" dans les villes et campagnes allemandes. L'Armée de l'Air, de son côté, a perdu 1,274 avions détruits (4).

Les pertes des autres alliés se répartissent ainsi:
  • Grande-Bretagne (4): 68,111 tués, blessés ou capturés. 959 avions de la Royal Air Force perdus, dont 477 chasseurs.
  • Belgique: 23,350 tués ou blessés.
  • Pays-Bas: 9,779 tués ou blessés.
  • Contingent polonais: 6,092 tués, blessés ou capturés.

La défaite et les conditions d'armistice divisent le territoire métropolitain en deux parties. Au nord, la "Zone Occupée" par l'Allemagne. Au sud, la "Zone Libre" gouvernée par le régime collaborationniste de Vichy du maréchal Philippe Pétain. En novembre 1940, s'établiera une frontière (strictement fermée) entre les deux, la "Ligne de Démarcation".

Photo ci-dessous: réaction des Parisiens lors du défilé des troupes allemandes sur les Champs Elysées, le 14 juin 1940.


A Londres, le général Charles de Gaulle refuse de reconnaitre le gouvernement de Vichy et décide de poursuivre le combat aux côtés des Alliés. Après son "Appel du 18 juin", il fonde le mois suivant le Comité National Français (CNF) et les Forces Françaises Libres (FFL). Certaines colonies, comme l'Afrique Equatoriale française, se ralieront bientôt à lui.

Photo ci-dessous: le général Charles de Gaulle parle à la BBC de Londres durant la guerre.


Selon les termes de l'armistice, ce qui reste de l'Armée française est démobilisé ou doit déménagé en Afrique du Nord. Ne peut demeurer sur le territoire national qu'une minuscule "Armée de paix" de moins de 100,000 hommes. La Marine nationale et l'Armée de l'Air doivent également quitter la Zone Occupée et gagnent soit la Zone Libre, soit des bases en Afrique du Nord.

Au sujet sensible de la marine de guerre française, encore pratiquement intact et qui représente une force redoutable, l'amiral François Darlan a assuré au Premier ministre Winston Churchill que ses navires ne tomberont jamais aux mains des Allemands. Mais l'Amirauté britannique doute et ne croit pas trop à ces promesses.

Le 3 juillet 1940, une escadre aéronavale commandée par l'amiral sir James Somerville déclenche l'opération Catapult. Après avoir envoyé un ultimatum à l'amiral Marcel-Bruno Gensoul, lui enjoignant d'appareiller soit pour Malte, soit pour Alexandrie, en Egypte. Mais celui-ci tergiversant, les Britanniques interprètent cela comme un refus. La mort dans l'âme, Somerville ordonne d'ouvrir le feu. Les navires et l'aviation embarquée britanniques bombardent alors les navires français au mouillage dans leur base de Mers-el-Khebir, en Algérie. Le cuirassé Bretagne est coulé, et le destroyer Mogador s'échoue. Trois autres Battleship (Dunkerque, Provence et Strasbourg) et plusieurs destroyers sont endommagés. Après avoir subi des réparations sommaires, ceux-ci appareillent et trouvent refuge à Toulon. Au cours de cette triste affaire, 1,297 marins français trouvent la mort, et 350 autres sont blessés.

Les conséquences de Mers-el-Khebir ne tardent pas à se faire sentir: les relations entre le gouvernement britannique et la France Libre se refroidissent, les propagandes allemande et vichyste vont en profiter au maximum.

Photo ci-dessous: le cuirassé Strasbourg sous le feu des navires britanniques.



(3) Karl-Heinz Frieser: Blitzkrieg-Legende, 2nd ed., Munich 1996, page 400.

(4) E.R Hooton 2007, pages 47-48: Hooton uses the National Archives in London for RAF records. Including "Air 24/679 Operational Record Book: The RAF in France 1939–1940", "Air 22/32 Air Ministry Daily Strength Returns", "Air 24/21 Advanced Air Striking Force Operations Record" and "Air 24/507 Fighter Command Operations Record". For the Armee de l'Air Hooton uses "Service Historique de Armee de l'Air (SHAA), Vincennes".



Série documentaire "Grandes Batailles de la Seconde Guerre mondiale"
(Henri de Turenne et Daniel Costelle) - Vidéo Youtube.


"Les Grandes Batailles" est une série d'émissions télévisées historiques de Daniel Costelle, Jean-Louis Guillaud et Henri de Turenne diffusée à la télévision française dans les années 1960 et 1970, qui décrit les principales batailles de la Seconde Guerre mondiale ainsi que le procès de Nuremberg. Les émissions donnent la parole aux officiers ayant participé à ces batailles ainsi qu'à des historiens. Ces interventions alternent avec des extraits de reportages. Les commentaires sont d'Henri de Turenne.


La Bataille de France (mai-juin 1940).

Pendant la Seconde Guerre mondiale, la "Bataille de France" est l'invasion allemande des Pays-Bas, de la Belgique, du Grand-Duché de Luxembourg et de la France en 1940. L'offensive, entamée le 10 mai 1940, met fin à la Drôle de guerre, et se termine le 22 juin par la capitulation des forces armées françaises et la signature de l'Armistice par le gouvernement Pétain.

















Article modifié le 10 mai 2020.


Sources principales:
Battle of France (Wikipedia.org)